Vous avez appris et bien moi je vous dis / Matthieu 5 38-48 / Une homélie

Comme dimanche dernier Jésus remet en cause ce qu’on a appris. Et comme il s’adresse à des têtes dures, aujourd’hui, il le répète deux fois. Je crois qu’il s’adresse à des têtes dures.
« Vous avez appris qu'il a été dit : Œil pour œil, dent pour dent. Eh bien moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant » Bienheureux commandement de Jésus ! Sinon son Eglise serait une assemblée de borgnes et d’édentés.
Cette loi, la loi du talion, nous vient du premier testament. Ce principe législatif est pour nous l’exemple d’une justice impitoyable et dure. Or, la Bible insiste sur la modération de cette proposition. La peine ne doit pas aller au-delà du préjudice, ce nouveau principe, est alors un progrès social qui permet de limiter l’escalade de la vengeance.
Jésus, lui qui nous dit, qu’il n’est pas venu abolir la loi mais l’accomplir, nous propose une loi encore plus dure et plus douce. Une loi plus difficile à appliquer pour la victime et plus miséricordieuse pour le méchant.
« Frères, n'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous. » Rendons grâce à Paul qui nous donne de comprendre pourquoi Jésus est si exigent. Vous êtes le temple de Dieu. Vous êtes le temple de Dieu. Dieu se réserve une place en chacun de nous. Son Esprit habite en nous. Notre corps est un tabernacle. D’autant plus quand nous recevons son corps et son sang. Abimer ce temple nous dit Paul est une offense à Dieu. Le cas échéant, le jugement du Seigneur passera. C’est pour cette raison que Jésus nous dit de dépasser la douce loi du talion. N’ajoutons pas notre perte à notre préjudice.
Comme cela est difficile à entendre. Comme cela est difficile à comprendre. Mais Paul insiste en nous disant : « Que personne ne s'y trompe : si quelqu'un parmi vous pense être un sage à la manière d'ici-bas, qu'il devienne fou pour devenir sage. »
Oui, il nous faut devenir fou pour être sage aux yeux de Dieu. Devenons fous aux yeux du monde. Car qui peut penser sainement que tendre l’autre joue lorsqu’on a été giflé n’est pas l’œuvre d’un fou ?
Le monde calcule. Le monde pèse et compare. Le monde légifère à sa propre mesure. Ainsi, le code civil définit la proportion de la peine par rapport au délit, souvent trop lourde pour le délinquant et trop légère pour la victime. Que la loi définisse la proportion de la peine est une bonne chose. Mais le mal se glisse dans l’appréciation qu’en ont, à la fois, le délinquant et la victime, l’un niant ou ne reconnaissant pas la gravité de ses actes, l’autre, souvent animé par la douleur et la vengeance, ne laissant pas de place au pardon.
Vous me direz tout dépend de l’acte. Il y a des actes si horribles que le pardon est impossible. Oui, je sais et pourtant la parole de Dieu exprimée par Paul vaut aussi pour le méchant : « Frères, n'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous. ». Tout homme est créé à l’image de Dieu, le bon comme le méchant. C’est le plus difficile à entendre et nous avons lu : « Car votre Père qui est dans les cieux fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. »
Pour Dieu tout homme est aimé qu’il soit bon ou méchant aux yeux du monde.
Nous avons appris par nos parents comment bien se comporter. L’école nous a enseigné la morale. Au catéchisme, nous avons appris les commandements. Le monde appelle tout cet enseignement les valeurs chrétiennes. Comme si l’amour se mesurait. Comme si l’apprentissage de ces valeurs pouvait être récompensé d’un diplôme. Voilà ce que nous avons appris, et bien aujourd’hui le Christ vient nous dire : « Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d'être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux »
Aujourd’hui, le Christ nous invite à être des fils. Ce n’est pas nous qui pouvons réclamer une quelconque filiation sur la preuve de ce que nous avons appris. C’est le Christ qui nous dit : aime et sois un fils.
Le Christ nous invite à ouvrir nos oreilles à sa parole pour qu’elle pénètre nos corps et bouscule nos certitudes. Nous devons la laisser renverser ces certitudes que nous basons sur ce que nous avons appris. Nous devons laisser notre étonnement prendre le pas sur nos refus et accueillir en confiance, avec foi, la parole du Christ.
Notre baptême nous délivre du monde qui nous enferme dans le calcul et la comparaison.
Notre baptême nous arrache à tout ce que nous avons appris.
Notre baptême nous ouvre à celui qui vient pour nous guider vers le Père.


Bénis le Seigneur, ô mon âme,
bénis son nom très saint, tout mon être !
Bénis le Seigneur, ô mon âme,
n'oublie aucun de ses bienfaits !

Car il pardonne toutes tes offenses
et te guérit de toute maladie ;
il réclame ta vie à la tombe
et te couronne d'amour et de tendresse.


Soyons des fils !
Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.
7° dimanche du temps ordinaire

Lv19, 1-2.17-18 // Ps 102 // 1 Co 3, 16-23 // Mt 5, 38-48

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