11 novembre / Marc 12 38-44 / Une homélie de JP Duplantier

32° dimanche du temps ordinaire, Année B
1Ro 17, 10-16 ; Ps 145 ; He 9, 24-28 ; Mc 12, 38-44

Le 29 février 2012 a été publiée au Journal officiel la loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France. Ce texte prévoit que la journée du 11 novembre, jour anniversaire de l’armistice de 1918 et de "commémoration de la victoire et de la paix", soit aussi un jour d’hommage à l’ensemble de ceux qui sont "morts pour la France" qu’ils soient civils ou militaires, qu’ils aient péri dans des conflits actuels ou des conflits anciens. Ce projet permettra notamment de rendre hommage à tous ceux qui ont péri au cours d’opérations extérieures.
Ici, à Gradignan, parmi les cérémonies de cette commémoration de la paix, il y a cette messe dans l’église de la commune. Et, dans l’élan de cette loi qui tente d’élargir l’hommage rendu à tous ceux qui ont donné leur vie pour la paix, nous sommes heureux d’écouter ensemble la tradition chrétienne concernant la paix.
C’est à travers des récits de la Bible que nous recevons cette tradition.
Le premier est l’histoire de la veuve de Sarepta et du prophète Elie. L’histoire de ce qu’on peut faire avec ce qui reste. Ce qui reste à la femme et à son fils, c’est une jarre d’huile et une jarre de farine, l’une et l’autre quasi vides. Sur la demande d’Elie, elle partage ce qu’elle cuit avec ces restes. Et les restes ne s’arrêtent plus de rester. Où nous conduit ce genre d’histoire ?
L’évangile de ce dimanche nous offre d’avancer un peu. Une veuve jette deux petites pièces dans le « trésor ». Quel trésor ? Celui de la salle du trésor dans le temple de Jérusalem. Cette anecdote est prise dans un récit concernant deux regards de Jésus sur ce qui se passe en ville. D’abord ce qu’il voit sur les places publiques, dans les synagogues et dans les diners ou apéritifs officiels. Jésus voit les « experts » de la Bible faire leur cinéma : se mettre en avant, sa pavaner, parce qu’ils savent tout, jugent de tout et mettent la main sur tout, jusqu’à dévorer les biens des veuves en abusant de leur faiblesse. Un joli morceau de comédie sociale,  facile à médiatiser parce que c’est du spectacle, ou seules comptent les apparences et les jeux de société.
Puis Jésus regarde ce qui se passe dans le temple, face à la salle du trésor. Il voit la foule jeter de l’argent dans ce trésor. Les riches y mettent beaucoup, une pauvre veuve n’y jette que deux petites pièces. Et il dit : « la veuve a mis plus que tout le monde. Comment compte-t-il ? Il tient compte d’où les hommes sortent ce qu’ils donnent.
Les riches le sortent de leur capital. Ce capital est fait de biens et d’images qu’ils ont acquis par l’un des systèmes de plus value en usage dans leur monde : celui des diplômes, du jeu des pouvoirs établis, des lois du marché, ou de leur montée dans l’échelle sociale. Or ce capital a une logique : il s’approprie plus et plus encore, il dévore, pour en jouir. Ils consomment ou simplement amassent des choses dans les petites et les grandes surfaces, trichent dans les échanges, manifestent un rapport de forces pour obtenir de nouveaux acquis, mais aussi prennent leur plaisir dans le lit qui leur convient le mieux. L’objectif est de faire grimper l’adrénaline, et leurs émotions finissent par commander leurs opinions.
Mais Jésus voit un autre espace d’où les hommes sortent ce qu’ils donnent. Cet espace n’est pas un plein, mais un creux en nous que rien ne peut combler. De ce creux vient un étranger qui nous manifeste un amour inattendu. Nous ne pouvons pas imaginer ce visiteur ni programmer ses visites. Il passe. Et de son passage il y a des restes. On peut essayer de les oublier, de les enfouir, mais peine perdue, ils insistent dans nos corps. Et leur insistance finit souvent, quand nous n’avons plus beaucoup qui reste, par réveiller un désir fou : le désir que revienne cet amour divin!
C’est cette révélation que porte Jésus-Christ. Chaque fois que nous venons ici à la messe, nous la réécoutons ensemble, et nous pouvons y recevoir d’y communier.
Ce sont ces visites qui nous donnent la paix. Pas seulement la paix que nous faisons en réduisant les conflits et les guerres, celles des soldats et celles des amoureux, mais la paix qui donne et maintient la vie en nous, quoiqu’il arrive.
Que cette paix vous vienne et demeure en vous. Nous allons maintenant, pour ceux qui le souhaitent, recevoir dans nos corps la paix de Jésus-Christ.
Jean-Pierre Duplantier

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