Luc 15 11-32 / Le fils prodigue / Une homélie

(...)
On connaît l’histoire : un père, deux fils, le plus jeune s’éloigne avec sa part, l’autre demeure.
Et voilà que survient une grande famine.
Voilà que la faim se fait douloureusement sentir.
Sans cette famine, sans cette faim, il ne se passerait rien dans la tête de ce fils.
On dit parfois qu’il se repent, qu’il demande pardon, mais il n’y a pas de trace de demande de pardon chez lui !
Ce qui le motive pour retourner vers son père, c’est le souvenir du bon pain qu’il mangeait auprès de lui.
Ce qui lui fait envisager un retour, c’est de savoir que les ouvriers mangent quand lui a le ventre vide.
C’est son ventre qui parle, c’est sa faim qui le remet en route.

L’autre, le fils aîné, il a aussi un problème de ventre.
Dans son amertume, dans sa colère, il y a d’abord un sentiment d’injustice car son frère a « dévoré » la fortune du père.
Il s’est goinfré, il a dévoré.

Lui de son côté, c’est le chevreau de la fête entre amis qui lui a manqué.
Il a souffert de cette faim-là, de ce manque-là.
Il avait de quoi se nourrir, mais cette nourriture de la fête, cette nourriture qui n’est pas de la nécessité mais du plaisir, il l’a attendue en vain.
Sa colère, elle n’explose pas parce que son père a pardonné à son frère, mais parce que son père a fait tuer le veau gras pour lui.
Dans la balance, il ne met pas l’amour du père pour son frère et pour lui, dans la balance, il met un chevreau et un veau gras.

Le grand moteur de toute cette histoire, c’est la faim.
Ces deux frères ont ça en commun : ils souffrent tous les deux de la faim.
Ils ont autre chose en commun : ils ne conçoivent pas que leur nourriture ne leur soit pas donnée.
Ils n’imaginent pas pouvoir se saisir eux-même de la nourriture dont ils ont besoin.
Ils leur faut absolument quelqu’un qui donne.

(...)
Quand à ce père lui-même, qu’en est-il de sa faim ?
Notre évêque nous rappelait hier soir que lorsque le texte dit qu’il fut « saisi de compassion », il faut lire « touché aux entrailles ».
C’est donc le ventre de ce père qui répond à la vue du fils qui revient.
Ce n’est pas le cœur, ce n’est pas la tête, c’est le ventre !
Il était affamé de son fils absent.

(...)
La faim, vous le savez bien, c’est la meilleure figure du désir.
Le désir qui ne peut se construire que sur un manque.

Nous avons chanté « goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ». Avons-nous goûté réellement comme est bon le Seigneur ? Comme il est bon pour notre faim… comme il est bon comme nourriture.
Car c’est bien Lui qui se donne en nourriture !
C’est bien lui qui est à la fois la nourriture et celui qui la donne !
Avons-nous le goût du Seigneur ?
Avons-nous le goût de sa Parole ?
Car cet ambon est une table. On ne se nourrit pas qu’à l’autel, on se nourrit aussi ici, à l’ambon, pas quand un prêtre ou un diacre nous parle, mais quand c’est le Seigneur qui parle, quand c’est lui qui donne son pain...

(...)
Réjouissons-nous
Avant de faire de beaux discours et de belles prières, laissons parler notre ventre, laissons parler notre faim, si nous sommes déjà repus, il n’y aura pas de place pour le désir…
que le matin de Pâques nous trouve comme des affamés !!
Revenons au père pour le goût du pain qu’il nous donne.


Amen
Sylvain diacre

Dimanche de "Laetare"... en rose





























Merci aux couturières et brodeuses !

Vendredi avec Mgr Ricard / 15 mars 2019

Monseigneur Ricard a passé la soirée avec nous vendredi 15 mars.
Après le temps de prière, il a rencontré les jeunes collégiens.
Ce fut un beau temps de partage et de dialogue.
En voici un petit souvenir.




L'aspect de son visage devint autre / Luc 9, 28-36, la transfiguration / Une homélie

La transfiguration n'est pas un événement mineur dans le parcours de Jésus. Le texte est proposé deux fois dans l'année liturgique, pendant le carême et à la fête de la transfiguration le 6 août, au cœur de l'été.
Puisqu'une fête est dédiée à cet événement, pourquoi l'Eglise nous propose-t'elle, en "avant-première" la lecture de ce texte de l'Evangile ? Qu'est-ce qui justifie sa lecture aujourd'hui, ce dimanche ?
Si, comme nous l'avons médité lors de la messe des Cendres, le Carême est un temps de conversion à laquelle nous nous exerçons par la charité, la prière et l'aumône, alors ce dimanche nous invite plus particulièrement à creuser en nous le besoin de prier Notre Seigneur pour que nous nous convertissions.
L'Evangile de ce dimanche nous relate l'histoire extraordinaire de la transfiguration. Jésus emmène avec lui trois apôtres, Pierre, Jean et Jacques pour prier sur la montagne.
"Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage devint autre" la prière quand elle est profonde et vraie elle vous transforme, elle vous porte au-delà de vous-même.
Dans le texte d'aujourd'hui, les protagonistes, Jésus et les trois apôtres plongent aussi véritablement dans la prière.
Jésus d'abord est transformé, on dit qu'il est transfiguré, il revêt déjà son corps glorieux, il prend l'aspect du ressuscité avant la croix.
Les apôtres, eux, le voient tel qu'il sera et non pas tel qu'ils aimeraient qu'il soit, un chef de guerre, un leader politique, un chef religieux.
C'est là un effet de la vraie prière. Quand notre prière est authentique, nous ne prions plus pour que soit faite notre volonté mais pour que la volonté du Seigneur s'accomplisse en nous
J'aime à penser que les trois apôtres prient avec Jésus. Et la prière des apôtres est en cela authentique que la vraie nature de Jésus se dévoile devant leurs yeux. Non seulement, ils touchent de leurs yeux la réalité du corps glorieux du Christ, ils ont une annonce claire et distincte de sa résurrection mais, en plus, les hommes de la première alliance apparaissent. Tout est cohérent aux yeux des trois apôtres, Jésus est bien celui que l'écriture annonçait depuis des siècles. Jésus n'est pas venu renverser mais accomplir les écritures.
Imaginons donc que les trois apôtres prient à côté de leur maître. Ce n'est pas spécifiquement écrit mais ce n'est pas non plus étrange comme idée. C'est tellement naturel de penser cela alors que toutes nos prières au Père se terminent par cette phrase : "nous te le demandons par ton Fils Jésus Christ qui vit et règne avec toi et l'Esprit-Saint pour les siècles des siècles".
Ainsi quand nous nous adressons à Dieu dans la liturgie, nous nous adressons au Père par la médiation de son Fils Jésus Christ. Quand nous prions ainsi, nous reconnaissons que le Christ prie à nos côtés. Quand nous prions le "Notre Père", les mêmes mots naissent sur les lèvres du Christ. A chaque fois que nous joignons nos mains pour prier, il a déjà joint les siennes dans une même attitude. Jésus ne nous imite pas mais il nous accompagne et mieux il devance nos prières.
C'est pour cela que j'évoquais plus haut la vraie prière, cette prière qui consiste à ce que la volonté du Père s'accomplisse en nous.
Un autre détail est à souligner. La prière des apôtres est communautaire. Les trois apôtres sont en communion, ils ressentent les mêmes choses, ils sont pris ensemble dans ce même sommeil mystérieux que nous interprétons aujourd'hui comme leur état de prière.
La prière communautaire est plus forte et plus stimulante. Elle a un effet entrainant. Nous n'apprenons rien nous qui assistons à la messe. Il y a toujours un moment où nous avons la sensation d'être transportés dans la prière dans un élan de communion.
Ces moments nous comblent et ils sont d'une telle joie que cela peut être un danger pour la vérité de notre prière. C'est d'ailleurs ce qui se produit pour les trois apôtres.
Maître, il est bon que nous soyons ici ! Faisons trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie."
Pierre n'est plus dans la vraie prière celle qui accomplit en lui la volonté du Seigneur mais il s'abandonne dans une joie un peu égoïste dans laquelle il veut garder tout cela pour lui et y demeurer. Il oublie que la vraie prière est pour la gloire de Dieu et le salut du monde.
Et le charme est rompu, les yeux des apôtres perçoivent désormais les réalités de la terre mais il reste tout de même quelques traces de ce qu'ils ont vécu. Il résonne encore à leurs oreilles une voix qui dit : "Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !"


J'ai demandé une chose au Seigneur, la seule que je cherche :
habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, *
pour admirer le Seigneur dans sa beauté
et m'attacher à son temple.


Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.