Demandez ! / Luc 11 1-13 / Une homélie

 

Savons-nous prier ?
C’est au fond la question que peuvent nous poser tous les textes d’aujourd’hui.

Autant le dire tout de suite : sur ce terrain, chacun fait comme il peut.
(...)
Un seul sait prier comme il faut : c’est le Christ
Alors quand il nous enseigne à prier, il faut tendre l’oreille.

(...)
 Que nous apprend Jésus ?
D’abord et avant tout, que prier, c’est demander.
Le Notre-Père, c’est une école de la demande.
Savons-nous demander ? Avons-nous encore des choses à demander au Seigneur ? Ou est-ce qu’on ne se tourne vers lui que pour se parler à nous-même ?
Est-on capables de demander sur le modèle du gros boulet mal-élevé qui débarque au milieu de la nuit ?
(...)
Il nous faut sans cesse réapprendre à prier.
- Comme Abraham, comme cet ami nocturne, prier non pas pour soi, mais pour les autres.
- Cesser de raconter sa vie, de faire des phrases, de tourner sur son nombril, mais demander… et insister, et répéter, et ne pas avoir peur d’être sans-gêne… parce qu’un enfant ne se gêne pas pour demander à manger à son père.

Voilà peut-être le nœud de l’histoire : quand nous prions, savons-nous être des fils ?
Les fils de ce Père-qui-est-aux-cieux, les fils qui osent dire leur faim, qui s’abandonnent dans la confiance… des fils mal polis…. Des fils qui préfèrent demander avec leurs mots maladroits et grossiers, avec leur colère et leur impatience, plutôt que des fils qui vont puiser au robinet d’eau tiède d’internet des prières toutes faites en bon langage catho.

Seigneur, apprend-nous à prier comme des fils.
Comme des fils inquiets de leurs amis, inquiets des autres, inquiets de ce qui leur manque.
Pardonne-nous toutes ces prières tièdes et tristes et sans demandes, ces prières qui sont des phrases, ces prières qui n’ont pas d’objets et dont tu ne peux rien faire.
Nous qui sommes si rapides à te soupçonner de ne jamais répondre à nos prières, interrogeons-nous sur l’état de nos prières.
(...)
Seigneur apprends-nous à prier,
fais de nous des fils affamés, des fils mal-élevés.

Amen
Sylvain diacre

Va, et toi aussi, fais de même / Lc 10 25-37/ Une homélie



 Dieu existe, je l’ai rencontré. Si, comme le dit Paul, Jésus est l’image de Dieu, du Dieu invisible, si je suis baptisé et frère du Christ, si tout homme est créé à l’image de Dieu, alors j’ai vu Dieu. Et je le vois d’où je suis chaque fois que je plonge mes yeux dans vos yeux. L’évangile de ce dimanche nous éclaire sur le sujet.

« Par hasard, un prêtre descendait par ce chemin ; il le vit et passa de l’autre côté. » Comment se fait-il que le prêtre n’ait pas vu l’image de Dieu dans les yeux de l’homme blessé ?

« Mais un Samaritain, qui était en route, arriva près de lui ; il le vit et fut saisi de compassion. » Le Samaritain a, de tout évidence, vu autrement que le prêtre et le lévite. L’un voit un homme blessé qui a besoin de secours et les deux premiers ne le voit pas comme cela.

Mais le début de l’histoire commence par la question du docteur de la loi : « Et qui est mon prochain ? » Jésus renvoie la question : qui a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits. La réponse évidente : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui. »

La réponse est juste, le prochain de l’homme blessé c’est celui qui prend soin de lui. Et pourquoi prend-il soin de lui ? Il est le prochain de l’homme blessé parce que quand il l’a rencontré, quand il a croisé son regard, il fut saisi de compassion.

A ce moment de mon propos, je nous invite à nous mettre dans la peau des hommes du moyen-âge au treizième siècle. Je voudrais évoquer la reproduction du vitrail de la cathédrale de Bourges qui est dans la salle saint Jean. La reproduction est une commande pour une manifestation du catéchisme, il y a plus de vingt ans. Et je tiens à souligner que l’artiste qui a réalisé ce vitrail a parfaitement respecté le cahier des charges.

Le vitrail raconte l’histoire du bon samaritain. Le premier médaillon en partant du haut représente l’homme qui quitte Jérusalem chargé de bagages. Le deuxième médaillon rapporte l’agression de l’homme par les bandits. Le troisième rapporte le moment où l’homme se fait dépouiller. Le quatrième relate le passage du prêtre et du lévite. Le dernier médaillon raconte l’arrivée du bon samaritain et de l’homme blessé à l’auberge. C’est sur ce dernier médaillon que je veux m’arrêter. J’invite ceux qui n’ont jamais vu le vitrail à aller le voir à la sortie de la messe. Sur ce dernier médaillon, il y a trois personnages, l’homme blessé sur la monture, le bon samaritain qui tient les rennes du cheval et l’aubergiste. Le détail remarquable de cette scène c’est que les artistes ont donné le même visage aux personnages de l’homme blessé et du bon samaritain. Ils ont donné le visage de Jésus flagellé et crucifié respectivement dans les médaillons situés à gauche et à droite de la scène de l’auberge.

C’est cette curiosité qui m’a permis de commencer par l’affirmation audacieuse empruntée à Raymond Devos : Dieu existe, je l’ai rencontré.

Dieu, nous le rencontrons, dans ceux qui souffrent mais aussi dans ceux qui soignent. Ils sont respectivement à l’image du Christ supplicié et à celle de Jésus qui guérit par ses miracles.

L’histoire du bon samaritain telle qu’elle est racontée par Jésus renverse notre premier élan.

Jésus ne demande pas au docteur de la loi qui est le prochain du bon samaritain, ce qui pourrait paraître logique. Il demande au docteur de la loi qui a été proche de l’homme blessé.

Il invite le docteur de la loi à reconsidérer sa suffisance alors qu’il voulait mettre Jésus à l’épreuve. Toi qui te considères si savant, toi qui te places si haut dans la société, demande-toi qui est ce prochain qui vient te guérir.

Ainsi, Jésus ne nous invite pas à nous mettre dans la peau de celui qui se dévoue mais bien dans celle de la victime. Il nous conduit à réfléchir sur qui est celui qui m’aide. Il nous pose dans l’état de celui qui est démuni, de celui qui est dans le besoin.

Jésus nous invite à nous penser comme un pauvre, un homme accablé. Il raye en nous l’image de riche plein de condescendance qui parfois nous habite.

« Va, et toi aussi, fais de même. » l’adresse, que nous fait Jésus ce dimanche, nous touche alors particulièrement. Il demande à chacun de nous : « Laisse-toi guérir, laisse-toi soigner par le Christ, il connaît tes blessures, c’est pour toi qu’il a souffert et est mort sur la croix. »


La loi du Seigneur est parfaite,
qui redonne vie ;
la charte du Seigneur est sûre,
qui rend sages les simples.

Amen !

 Dominique Bourgoin, diacre.