Dimanche de la Parole de Dieu 2020 / Mt 4 12-23 / Une homélie

(...)
Il faut entendre le récit tel qu’il nous est donné à lire :
Jésus passe / il appelle / on le suit.
Ces hommes le suivent parce qu’il les appelle. C’est tout. L’appel suffit.
C’est en entendant sa voix que ces hommes laissent tout et le suivent.
C’est à sa Parole qu’ils répondent.
Jésus parle, et la vie de ces hommes bascule
Jésus parle et nos vies basculent

Jésus c’est le verbe fait chair, c’est la Parole de Dieu dans la chair.
Donc quand Jésus parle, la Parole de Dieu se fait entendre.
Ces hommes le suivent parce qu’ils ont des oreilles, parce qu’ils sont réceptifs à Dieu-qui-parle.
Ils ont perçu dans cette voix la présence de Dieu pour eux, pour leur vie...
Et qu’importe le message, car comment comprendre en effet cette promesse étrange de devenir « pécheur d’hommes » ?
Tant pis si l’on ne comprend pas, c’est la voix qui percute, c’est la Parole qui soulève.

Où en sommes-nous avec la Parole de Dieu ?
Où en sommes-nous avec l’Ecriture ?
(...)

La lecture, ce n’est pas une affaire d’intellos, c’est une affaire d’amoureux !
On ne lit pas l’Ecriture pour en trouver le sens et devenir des savants, (encore moins pour y trouver un code de la route, ou un supplément de loi), mais pour permettre à la Parole de celui qui nous aime de percuter nos vies…
Pour laisser au Seigneur la voie libre pour travailler nos chairs.

Il y a mille manières de lire, mais s’il s’agit d’entendre, rien de plus efficace que de lire avec d’autres… parce que le Seigneur se tient aussi dans mon frère.
Parce que lire à plusieurs, ça donne de la voix, ça permet que la Parole résonne parfois, sans qu’il le sache, dans la voix de mon frère…

Par sa Parole, Jésus fait de ces hommes dans leurs barques, des disciples.
C’est la Parole qui fera de nous des disciples.
Et si nous voulons être disciples-missionnaires, et bien invitons à la lecture !

Rejoignez des groupes, créez des groupes, faites lire les enfants, les ados, lisez chez vous, lisez à deux, chantez l’Ecriture, mâchouillez la Bible, apprenez des bouts d’évangile par cœur !

- Que personne ne dise « ce n’est pas pour moi », les pécheurs sur leur barque ne disent pas « ce n’est pas pour moi »
- Que les hommes ne disent pas « c’est un truc de femmes » ! ou alors qu’ils viennent m’expliquer ce mystère.
- Que les jeunes ne disent pas « c’est un truc de vieux » !
- Que les vieux ne disent pas « j’ai déjà fait le tour de la question » !
- Que personne ne dise « nous ne pouvons pas lire tout seuls, il nous faut un maître »
Faites confiance au texte lui-même, respectez-le, laissez-le faire, ne cherchez pas quelqu’un qui parlera à sa place… nous ne sommes ni de Paul, ni d’Apollos ni de Pierre… ni de Fabien ni de Jean-Pierre et encore moins de Sylvain, mais du Christ.

Si nous ne scrutons pas le Christ dans sa Parole, nous nous inventerons un christ
Si nous nous inventons un Christ, il sera à notre image et nous annoncerons un faux Christ
Et si nous nous inventons un Christ, à quel corps viendrons-nous communier ?
Et puis si nous ne scrutons pas la Parole dans les Ecritures, comment la reconnaîtrons-nous quand elle se mettra à parler ailleurs ? dans nos frères, dans nos chairs….

Ayons conscience, avec François dans sa lettre, que « nous avons un besoin urgent de devenir familiers et intimes de l’Ecriture sainte et du Ressuscité ».
ne les séparons pas, ils marchent ensemble.

Amen
Sylvain, diacre

L'Agneau de Dieu / Jn 1, 29-34 / Une homélie

La partie inaugurale de la vie publique de Jésus est marquée par une série de témoignages forts, comme pour attester l’authenticité à la fois de sa mission et de son identité de Messie et de Fils de Dieu : en tant qu’accomplissement des promesses divines que l’évangile de Jean résume en ces termes : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle » (Jn. 3,16).
Dimanche dernier, au baptême de Jésus, alors que l’Esprit-St descendait sur lui sous la forme corporelle d’une colombe, la voix du Père tonnait : « Celui-ci est mon Fils bien aimé, en qui j’ai mis toute ma joie » (Mt 3, 17).
On peut bien comprendre que ce soit le Père qui rende le tout premier témoignage sur Jésus, d’autant plus qu’il est la source et l’origine même de la mission dont est investie le Christ.
Aujourd’hui, c’est Jean le Baptiste qui, à la suite du Père, rend témoignage à Jésus en nous dévoilant son identité et sa mission à travers deux attributs sur lesquels je vous propose de porter notre méditation de ce jour.

1. Jésus est « l’Agneau de Dieu »
« Voici (dit Jean-Baptiste) l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ».
L’identification de Jésus comme « Agneau de Dieu» est inédite. Elle ne se retrouvera dans l’évangile de Jean qu’au verset 36 de ce même chapitre 1er, lorsque le Baptiste présentera Jésus à ses propres disciples. De fait, c’est le titre de la première adhésion à Jésus dans l’Évangile, par lequel les premiers disciples de Jésus (André et, probablement, Jean) demeurèrent avec lui lorsqu’il leur fut introduit par leur premier maître, Jean le Baptiste.
Pour le comprendre, il faut noter que la référence à l’agneau a ses fondements dans l’Ancien Testament. Et dans cette vision grandiose du Baptiste au bord du Jourdain, semble avoir été convoqué ici Tout l’Ancien Testament, en partant déjà d’Abraham qui avait prédit à son fils Isaac que : « Dieu saura bien trouver l’agneau pour l’holocauste » (Gn 22, 8).
Pour les spécialistes de la Bible, 3 principales fonctions se dégagent de la référence à l’Agneau : 
 

* Soit il s’agit de l’Agneau décrit par Isaïe (53,7) : « Comme un agneau traîné à l’abattoir, comme une brebis muette devant celle qui la tondent, il n’ouvre pas la bouche ». Et dans ce cas Jean verrait en Jésus la figure du Serviteur Souffrant qui prend sur lui la condition pécheresse du monde.


* Soit il s’agit de « l’Agneau immolé et dressé » de l’Apocalypse qui, d’après St Jean, est capable de remporter la victoire sur le péché et la mort (Ap. 5,6 ; 14,10; 17,14).

* Soit il s’agit de « l’Agneau Pascal » : Toujours selon Jean et cette fois dans l’évangile (19, 14), Jésus est crucifié à l’heure où les prêtres commencent à sacrifier les agneaux pour la fête de Pâque).  

Et si l’on ne perd pas de vue que l’évangéliste écrit à une époque postérieure à l’événement de Pâques à destination d’un auditoire qui vit une forte instabilité religieuse et sociale entraînant une importante crise spirituelle, on comprend plus clairement le lien qu’il établit entre Jésus-agneau pascal et ce peuple : la Gloire de celui-ci rejaillira sur ces derniers qui auront persévéré pour demeurer fidèles.

Mais est-il possible de dissocier, d’isoler chacune de ces significations d’«Agneau de Dieu» sans tronquer la réalité de cet attribut de Jésus? Clairement non.

Car l’attribut d’ « Agneau de Dieu » a une densité et une profondeur telles que l’on ne peut s’autoriser à le réduire. D’ailleurs, l’on ne saura jamais le sens précis de la formule dans la bouche de Jean-Baptiste. Et ce n’est pas plus mal. Car au moins, nous savons l’essentiel : C’est que « Jésus est l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde » !

C’est-à-dire qu’il est le Serviteur de Dieu qui prend sur lui et assume nos fragilités et nos misères humaines, nos fautes et nos péchés. En ce sens, « Le Christ-agneau porte, supporte et emporte le péché du monde » parce que, pour nous et à notre place, il se met à la merci de tous les prédateurs de tous poils : sociaux, politiques, économiques, sexuels…, qui aujourd’hui incarnent le péché du monde en s’en prenant au plus faibles et aux plus petits.

Mais ce n’est pas tout.
Il est aussi « l’Agneau immolé et dressé », c’est-à-dire celui qui nous donne force et pouvoir de dominer les attractions de nos contingences humaines et les chaînes de nos esclavages multiformes qui nous tirent toujours vers le bas. Car il est lui-même vainqueur du mal sous toutes ses formes.

Mais pas seulement.
Il est encore « l’Agneau Pascal », l’agneau glorieux dont la gloire rejaillit sur tous ceux qui auront cru et vécu à la lumière de son message. 

En désignant ainsi Jésus « Agneau de Dieu » (et souvent l’iconographie présente Jean Baptiste le doigt levé vers Jésus), Jean a terminé sa mission : il est venu annoncer Jésus, dans son incarnation, sa mort et sa résurrection. Il peut laisser toute la place à Jésus. Dans quelques instants le prêtre reprendra le paroles de Jean en présentant la sainte hostie : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ». Saurons-nous le reconnaître comme tel ?

2. Jésus est le « Fils de Dieu » 
« Moi, (dit Jean le Baptiste) j’ai vu, et je rends témoignage : c’est lui le Fils de Dieu. »
Ce témoignage du Baptiste est le couronnement d’une version toute personnelle du baptême de Jésus, différente de celle des autres évangélistes.

Dans la version de Jean, c’est Jean-Baptiste qui voit l’Esprit descendre sur Jésus. Ses yeux de chair voient un homme qui se met dans la file des pécheurs pour se faire baptiser alors qu’il n’en a pas besoin : « L’homme qui vient derrière moi est passé devant moi ». Et la révélation de Dieu lui donne de reconnaître en Jésus le « Fils de Dieu ».

Jésus, « Fils de Dieu », s’est fait homme pour que nous devenions fils de Dieu nous aussi. Voilà le témoignage de Jean Baptiste. Voilà ce que nous croyons en recevant le baptême. Nous sommes les enfants bien-aimés du Père. Nous sommes toute sa joie… Voilà ce qui se passe quand nous descendons dans le baptistère, quand nous versons ou faisons verser de l’eau sur la tête des enfants ou des adultes en disant : « Je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ». Nous devenons Fille ou Fils de Dieu.
Mais nous avons souvent du mal à témoigner de notre filiation divine, parce que nous avons peur du regard des autres, de l’indifférence des autres, voire même de la différence avec les autres ; ou bien nous doutons que Dieu demeure en nous.

Pour Jean donc, Jésus est « l’Agneau de Dieu », celui qui préexiste, le « Fils de Dieu » rempli par l’Esprit St.
C’est par Jésus seul que nous pouvons vraiment nous tourner vers Dieu, comme il l’a fait lui-même en consacrant toute sa vie à l’œuvre divine. En coulant notre volonté dans sa volonté, nous offrons au Seigneur le véritable sacrifice qu’il attend de nous.

Jean-Baptiste en témoigne ; sa mission y trouve tout son sens. Voici qu’aujourd’hui le Fils bien-aimé prend à son compte les paroles du psaume : « Dans ma bouche, le Seigneur a mis un chant nouveau, une louange à notre Dieu. Tu ne demandais ni holocauste, ni victime, alors j’ai dit : ‘Voici, je viens!’».

C’est encore lui qui parle, en reprenant les mots d’Isaïe : « Oui, j’ai du prix aux yeux du Seigneur, c’est mon Dieu qui est ma force. » Par le baptême d’eau et d’Esprit, nous sommes enfants d’un même Père, donc frères dans le Seigneur et avec lui. Si le Christ s’applique à lui-même la phrase du prophète, combien nous rejoint-elle aussi ! Alors, j’ose vous le redire, à vous tous et à chacun en particulier : « Oui, tu as du prix aux yeux du Seigneur, ton Dieu est ta force !»
Puissions-nous, ensemble, en réponse à l’amour du Père et avec Jésus, dire : « Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté ! ».

Amen.

Père Calixte Koulaté

Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma Joie / Mt 3 13-17 / Une homélie

Ce dimanche, nous fêtons le baptême de Jésus, la dernière fête du temps de Noël. C’est aussi ce dimanche que se réunissent les fiancés qui vont se marier dans l’année pour une journée de rencontre. Et enfin, nous sommes tous réunis dans cette église pour partager l’Eucharistie, le repas auquel nous invite le Christ. Cela fait bien trois raisons de s’interroger sur ce qu’est un sacrement.
L’occasion est belle car le texte de l’Evangile de ce dimanche a de quoi nous donner à méditer.
Qu’est-ce qu’un sacrement ? N’est-ce pas le ciel et la terre qui se rejoignent pour la plus grande gloire de Dieu et la joie pour les hommes ?
Regardons le texte de plus près même si on ne peut pas dire que le baptême de Jésus est un sacrement tel qu’on peut l’entendre aujourd’hui.
Toutefois le schéma est intéressant. Il y a tout d’abord Jésus qui est dans le rôle du demandeur et Jean-Baptiste dans celui du ministre, du serviteur qui va accomplir le geste.
Dans tout sacrement, il y a un serviteur ou un témoin qui rend visible ou qui signifie la rencontre. Mais surtout il y a un être humain sur qui s’accomplit la parole qui accompagne le geste.
Dans l’Evangile de ce dimanche cette place est tenue par Jésus lui-même, et il y a comme une nouvelle incarnation dans le geste et la parole qu’il reçoit.
Jésus nous signifie ainsi que nous aussi nous pouvons profiter de cette rencontre. Un sacrement, ce n’est ni réservé à une élite ni à une divinité. Le sacrement c’est pour tous les hommes, c’est pour nous, pour nous relever, pour nous faire grandir, pour nous extraire de notre humus, pour notre joie, pour que s’accomplisse la bonne nouvelle de la visite de Dieu en nous.
« Alors Jean le laisse faire. » Elle peut sembler bien curieuse cette phrase, Elle laisserait entendre que Jean-Baptiste est passif. Mais elle a toute sa saveur dans l’attitude de Jésus. Celui qui reçoit un sacrement n’est jamais passif.
Dans un instant, vous allez bien vous lever pour communier, vous allez bien tendre la main pour recevoir le corps du Christ. Les époux échangent bien leurs consentements. Et le baptisé incline bien la tête vers l’eau. Le pénitent se présente au prêtre et demande explicitement de recevoir le sacrement de réconciliation. Il y a de l’action de la part de ceux qui reçoivent le sacrement. Cela engage leur liberté, il n’y a pas de sacrement sous la contrainte. Et c’est aussi de cela que vient la joie.
Il n’y a pas que le demandeur qui est acteur bien sûr. A ce stade, nous pourrions évoquer le ministre du sacrement ? Curieusement, dans le texte de l’évangile de Matthieu, nous ne savons pas ce que fait Jean-Baptiste. Le geste lui-même de Jean-Baptiste est passé sous silence. C’est certainement parce que ce geste n’est pas une fin en soi mais qu’il donne à voir ce qui se passe réellement.
Matthieu nous révèle alors une réalité qui échappe à notre entendement. « Et voici que les cieux s’ouvrirent », il n’y a plus de séparation entre le ciel et la terre, les cieux sont ouverts, ça circule. Désormais ce qui concerne le ciel, concerne la terre et ce qui concerne la terre concerne le ciel. La porte est ouverte pour l’action du sacrement. Comme je le disais au début un sacrement n’est-ce pas le ciel et la terre qui se rejoignent pour la plus grande gloire de Dieu et la joie pour les hommes ?
Un acteur important se révèle dans ce passage, l’acteur essentiel de tout sacrement : «  il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. » C’est avec l’Esprit Saint que s’opère la rencontre lors d’un baptême, c’est lui qui consacre le mariage, c’est lui qui transforme le pain en corps du Christ.
C’est cette rencontre qui nous comble ou qui aiguise notre désir plus grand de connaître Dieu. C’est l’Esprit Saint qui met notre main dans la main du Christ pour un bout de chemin.
Enfin vient reposer sur nous une parole qui vient du Père. Je suis convaincu qu’à chaque baptême, le receveur entend mystérieusement : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je trouve ma joie. ».
A chaque communion, nous savourons mystérieusement le goût du Christ et c’est là notre joie.
A chaque mariage, les époux sentent leur union prendre force.
A chaque réconciliation, nous sentons couler sur nous la miséricorde du Père.
« Voici mon serviteur que je soutiens,
mon élu qui a toute ma faveur.
J’ai fait reposer sur lui mon esprit ;


Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.