l'Aveugle né / Jn 9 1-41 / Une homélie de JP Duplantier

Aveugle de naissance ! Ce n'est pas normal. Chacun a le droit d'entrer dans la vie avec toutes ses chances. S'il est dans cet état, c'est que quelqu'un en est responsable. Il y a eu une faute quelque part. Et comme l'homme est crée bon, ce ne peut être une erreur de sa part, c'est donc forcément une faute des parents ou de lui-même. Voilà ce que pensent les disciples. Et nous sommes comme eux. Il y a la création, puis le péché et à la fin la rédemption.
Or Jésus refuse ce discours imaginaire. Ce n'est pas du côté du péché qu'il faut regarder, mais du côté de l'oeuvre de Dieu qui va se manifester chez cet aveugle. Le péché est ailleurs. Je vous invite ce soir à garder et à contempler cette révélation du Christ.
 
D'abord le geste de Jésus : de la terre et de la salive sur ses yeux. Une manière d'évoquer l'acte créateur de Dieu. Nous avons été modelés avec de la poussière et la parole de Dieu. Mais cet acte créateur ne s'arrête pas là. Jésus ajoute la piscine de Siloé, de l'envoyé : il faut y aller se laver. Comme l'écrit saint Irénée, «Dieu a modelé l'homme en vue de ses dons..., Il lui fallait encore habituer l'homme sur la terre à porter son Esprit, à vivre en communion avec Lui.» Il fallait que l'homme aille se laver de tout ce qu'il construisait à son propre compte qu'il apprenne à tenir compte pas à pas de ce que l'envoyé du Seigneur lui montrait, concernant le chemin qu'il devait suivre pour que s'accomplisse ce que Dieu désire pour lui. Il fallait qu'il puisse voir dans le cours de sa vie sur terre comment le Christ Jésus le conduit par la main.
 
Voilà ce que voit Jésus chez l'aveugle-né : au commencement, l'homme reçoit de Dieu tout ce qu'il faut pour qu'il devienne fils à son image et à sa ressemblance. Mais il ne peut pas devenir ce Fils par lui-même. Sa connaissance, sa volonté et sa force sont incomplètes. Il ne peut pas vivre sans la présence de l'Esprit, la Parole de Dieu en Jésus-Christ et la grâce du Père. Le péché, c'est résister, puis refuser l'oeuvre de Dieu au long cours, à chaque moment de son existence charnelle. C'est résisté maintenant.
 
Tous les acteurs du récit que nous venons d'entendre s'efforcent de ne pas voir ce qu'ils ont sous les yeux. Les voisins, les pharisiens, les parents ont tous de bonnes raisons de ne pas faire le lien avec la guérison de cet aveugle et leur propre situation. Alors ils le chassent. Et Jésus va retrouver l'aveugle. Il vient nous retrouver ce soir, maintenant. Crois-tu au Fils de l'homme ? Qui est-il ? C'est moi qui te parle. Viens te laver dans la piscine de l'envoyé. Tu as appris à nager plus ou moins bien dans les eaux du monde où tu vis. Comme beaucoup tu as peur de te noyer dans ces eaux tumultueuses et incontrôlables. Tu t'accroches à tout ce qui te semble flotter encore : Les habitudes, les convictions, le valeurs qui soutiennent le vie familiale, nos parcours professionnels, nos comportements sociaux. En eux-mêmes ces repères ne sont pas notre péché. Le danger réel vient de ce qu'ils nous enlèvent le temps et le goût de devenir familier au quotidien du travail que fait le Christ Jésus en nous et autour de nous, d'en prendre les moyens et d'obéir à ce qu'il nous montre.
 
Nous allons vivre deux gestes : celui de l'aveu et celui du pardon. L'aveu de l'état de notre relation avec le Christ, de notre prière, de notre capacité à voir ce qu'il fait en nous et autour de nous en ce moment. Le pardon qui nous est donné dans le geste du prêtre, afin de nous donner à voir sa miséricorde : le Seigneur se réjouit de ce que nous revenons à Lui.

Jean-Pierre DUPLANTIER

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