Demandez, vous obtiendrez / Luc 11, 1-13 / Une homélie

Dans l’extrait de la Genèse que nous offre l’Église ce dimanche nous assistons à un dialogue étrange entre Dieu et Abraham.
C’est Dieu qui amorce la discussion en livrant son inquiétude à propos du comportement des gens de Sodome et de Gomohrre. Entendre Abraham, le Père de tous les croyants, auquel est promis une grande descendance discuter pas à pas, avec respect certes avec le créateur nous interroge. Et nous voyons Dieu qui se plaît à voir en Abraham celui qui bataille avec lui pour le salut de la ville pécheresse.
Dieu entre en conversation avec son allié de la terre, et voilà que nous est révélé une solidarité spirituelle entre les humains et le projet de Dieu.
Pour se révéler et pour accomplir son œuvre de salut Dieu a besoin des hommes il à besoin de nous. Dieu n’est pas solitaire.

Du côté d Abraham on peut souligner une grande confiance et une foi sans faille en la miséricorde divine. Dieu a aussi besoin de notre confiance ? de notre foi.
Ce qui est frappant c’est que Abraham s’arrête au chiffre de dix justes. ( « juste » = ajusté à la volonté de Dieu) On pourrait le regretter.
Pourquoi n’a-t-il pas poursuivi ses demandes au-dessous de dix ?
Nous ne sommes pas devant un marchandage ou une négociation. L’œuvre de Salut appartient à Dieu.
C’est comme si le chemin s’ouvrait maintenant au seul juste qui suffira pour sauver l’humanité dont Saint Paul parle à sa manière dans la lettre au Colossiens

« Dieu nous a donné la vie avec le Christ. Il a payé la dette, Il l’a annulée en la clouant à la croix du Christ. »

Le mystère pascal s’impose à nous une fois encore… particulièrement chaque fois que nous célébrons l’Eucharistie.
Nous sommes concernées et invités à collaborer à l’œuvre de salut. Nous ne pouvons nous sauver nous-mêmes. Tout Salut comme toute prière se feront désormais :
« Par Jésus Christ notre Seigneur. » - « Par Lui, avec Lui et en Lui » c’est ainsi que culmine la prière Eucharistique.

Dans l’Evangile de ce jour Jésus nous incite fortement à tendre la main.
Dieu attends notre confiance, notre persévérance et notre obstination à toujours demander. Soyons sans gêne ! Ayons de l’audace à l’image de celui qui dans la Parabole frappe a la porte de l’ami qui ne sait pas assurer hospitalité et qui finalement accueillera.
« Demandez on vous donnera ; cherchez vous trouverez, frapper on vous ouvrira. »
Dans l’Evangile Jésus vient ajuster l’acte de prier.

« Quand vous priez dites »
Jésus ne propose pas un geste ou une pensée mais il nous demande de « parler » Il nous demande d’avoir l’ initiative de la rencontre.
En commençant par « Père » nous nous plaçons en position filiale et reconnaissons que nous nous recevons de ce Père.

« Que ton nom soit sanctifié »
Que ton nom soit sanctifié . Le nom représente Dieu dans son être et son être Saint. Le tout Autre.
Mettons à l’écart ce qui dans notre imaginaire vient entacher et encombrer ce nom par nos propres représentations. Dieu n’est pas un magicien qui va régler tous nos problèmes.

« Que ton règne vienne »
Si la venue du règne est notre désir profond, si nous le souhaitons sincèrement nous reconnaissons notre responsabilité dans cette venue.
Ce n’est pas arrange-toi pour que ton règne vienne et j’attends tranquille que ton règne vienne. Mais j’adhère et je m’engage comme fils et disciple a œuvrer avec toi, Père, à la venue de ton règne.
Nous n’avons pas de souci à nous faire quant au règne de Dieu au ciel, mais sa venue sur terre c’est aussi mon affaire.
Aide-moi à faire venir ton règne sur la terre.
Ensuite nos demandes et nos actes seront ceux de disciples missionnaires.
... La où le pauvre est accueilli, la où la porte est ouverte, la où la fraternité au nom de Jésus et la solidarité humaine sont exercés, la ou viendra le pardon, là où la paix et la concorde sont recherchées.
Chacun trouvera la manière et le chemin pour être artisan de la venue du règne avec l’aide de Dieu

Chers amis, sur nos chemins humains souvenons-nous que Dieu attends notre prière, nos demandes.
« DEMANDEZ VOUS OBTIENDREZ... »

Nous n’obtiendrons sans doute pas exactement ce que nous souhaitons, mais je voudrais vous laisser repartir chez vous tout-à-l’heure avec une certitude, et je la tire de la Parole même de Jésus

« Le Père du ciel donne l’Esprit à ceux qui lui demandent »
Je dois là rectifier la traduction liturgique qui nous fait entendre « a ceux qui le lui demandent » . Ce « le » est inexistant dans la parole originelle.
Toute demande, toute prière au Père, qui nous met en position filiale ,nous vaut le don de l’Esprit.

Et c est l’Esprit qui nous guide sur nos chemins ; dans nos choix, dans nos engagements, si nous-même n’y mettons pas obstacle, car Dieu ne nous laisse pas entrer en tentation, mais il attend notre confiance, notre foi pour le Royaume.

Seigneur apprends nous à prier comme des fils et donne nous ton Esprit.

Amen

Robert Zimmermann,
Diacre

La part de Marthe / Lc 10 38-42 / Une homélie

(...)
Dieu entre aussi chez nous d’autres manières.
Par exemple, dans quelques instants, quand nous approcherons de cet autel pour communier à son corps, Dieu descendra chez nous…. Au plus intime de notre chez nous.
Il viendra chez nous, car en nous, il est chez Lui

Et quand nous lisons l’Ecriture avec d’autres, là encore, Dieu entre chez nous !
Puisqu’il est dans sa Parole, quand sa Parole entre dans nos oreilles, il entre aussi dans nos oreilles… Il entre, et il s’installe
(...)
Nous avons tous en nous Marthe et Marie.
La part de Marthe et la part de Marie
Quand Dieu vient chez nous, les deux parts, Marthe et Marie se lèvent en chacun de nous.

Il y a la part de Marthe, celle qui veut faire… celle qui pense qu’il faut absolument faire
S’agiter, faire des réunions, faire des bilans, envoyer des mails, organiser des trucs… ou bien faire des bonnes actions, faire de belles prières, faire des sacrifices, faire de beaux discours, faire ce qu’il faut faire pour être disciple-missionnaire….
La part de Marthe est une part utile, indispensable, sans elle, le Seigneur n’est pas servi…
mais elle impose de sans cesse se poser la question : qui est-ce que je sers ?
Est-ce que c’est le Seigneur ou est-ce que c’est moi-même ?
Est-ce que je nourris le Seigneur ou est-ce que je nourris ma propre image ?

Heureusement, la part de Marthe n’existe pas sans la part de Marie.
Ce qui en nous s’assoie, se tait et écoute…
Ce qui est capable de se tourner entièrement vers le Seigneur, sans rien faire d’autre…
Ce qui est capable de ne rien faire que d’écouter.
C’est la part des oreilles… Marie est toute oreille.
Il y a en nous cette part qui ne fait rien, cette part qui écoute sans rien dire, qui attend tout du Seigneur, qui sait qu’en venant chez nous, c’est lui qui va nous nous nourrir, qui va nous faire du bien, c’est lui qui fait… pas nous.

Si la part de Marthe prend le dessus, le danger, c’est la tristesse, c’est la colère retournée vers le Seigneur lui-même…
Servir en râlant, servir en ronchonnant, accueillir le Seigneur sans lui laisser de place, oublier que si on ne l’écoute pas, on ne le sert pas…. On se sert soi-même.
(...)
Acceptons qu’en nous s’installe l’inévitable tension entre Marthe et Marie,
mais réjouissons-nous comme Abraham de voir le Seigneur attablé chez nous, se régalant de ce qu’il aura trouvé lui-même dans nos placards…

Amen
Sylvain, diacre

La main à la charrue / Luc 9 51-62 / Une homélie

(...)
Travailler au Royaume, c’est d’abord une histoire de labour, c’est mettre la main à la charrue.
C’est donc creuser la surface de la terre pour y tracer un sillon.
Creuser la terre pour participer aux semailles… aux semailles d’un autre !
Nous ne sommes pas les semeurs !
Il est bon de ne pas l’oublier quand nous voulons nous vivre en missionnaires…
Nous n’avons pas à semer, ce n’est pas notre boulot, notre boulot, c’est de creuser la terre en amont, avant le passage du semeur…

- Creuser la terre, c’est ouvrir ce qui est clos
C’est descendre au-delà de la surface
Au-delà de la surface de la terre, de la surface des choses, de la surface des gens, de la surface des mots.
C’est déchirer les évidences…

Pour cela, nous avons alors plusieurs charrues à notre disposition…

Tout d’abord, il y a la charrue de la lecture.
Que faisons-nous quand nous lisons l’Ecriture ensemble ? Quand nous venons partager un temps de lecture avant la messe aux Grands dimanches, le vendredi après la prière ?
Nous labourons ! Nous creusons le monde !
Nous faisons le pari que derrière les mots qui nous sont donnés à lire, quelque chose, quelqu’un nous attend.
Mais pour ça, il faut creuser, il faut gratter, parfois c’est rude, c’est sec, il y a des cailloux, de la poussière qui nous ferme les yeux…

La vérité, c’est que c’est le texte lui-même qui nous laboure !
C’est lui qui creuse en nous son sillon...
Et notre travail prépare la semence.
La lecture n’est pas une recherche de savoir, une quête de sens réservée à des spécialistes, un lieu d’enseignement dont il faudrait avoir les codes !
La lecture c’est simplement se confronter aux mots, au langage, et les ouvrir, et les déplier, et attendre ce qui se lève.

Il y a aussi la charrue des sacrements
C’est la charrue qui ouvre le monde à la Vérité.
C’est la charrue qui creuse un morceau de pain, pour en faire le corps du Christ
Qui creuse les fils du monde pour en faire des fils du Père
La charrue des sacrements est une charrue puissante !

Il y a la charrue de la charité
Celle qui creuse notre regard sur ceux qui nous entourent.
Qui creuse notre regard pour nous faire voir sous le pauvre, le frère,
Sous le prisonnier, le bien-aimé de Dieu.
Sous le vieillard malade, le héros des combats
Derrière le corps humilié du crucifié, le roi glorieux.
C’est la charrue de l’amour, celle de la miséricorde.

Et il y a aussi la charrue du pardon, celle de l’obéissance, celle de la Joie, d’autres encore…
Toutes sont équipées du même soc : celui de l’Esprit saint

(...)
Rendons grâce au semeur pour les laboureurs du royaume.
Rendons grâce parce que chacun de nous creuse le sillon du royaume,
comme il peut, à sa mesure, à son rythme… probablement sans le savoir...

Parfois, il se peut que nous trouvions la charrue un peu lourde et la terre bien dure,
mais dans ce sillon se cache notre Liberté et notre Joie.


Amen
Sylvain, diacre