Toussaint 2012 / Une homélie de JP Duplantier

« Mes bien aimés, voyez comme il est grand l’amour dont le Père vous a comblés. Il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu et nous le sommes. » Ainsi parle l’apôtre Jean à ses frères dans le Christ.
En cette fête de la Toussaint, suivi du Jour des morts, à mon tour, humblement, je vous le dis à nouveau.
A tous ceux chez qui, récemment ou depuis longtemps déjà, la mort de l’un de leurs proches, a laissé une blessure vive ou des cicatrices qui ne s’effacent pas, écoutez ces deux textes célèbres du Nouveau Testament que nous lisons aujourd’hui.

Celui de l’Apocalypse :
« Après cela je vis: C'était une foule immense que nul ne pouvait dénombrer, de toutes nations, tribus, peuples et langues. Ils se tenaient debout devant le trône et devant l'agneau, vêtus de robes blanches et des palmes à la main. L'un des anciens prit alors la parole et me dit: Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d'où sont-ils venus? Je lui répondis: Mon Seigneur, tu le sais! Il me dit: Ils viennent de la grande épreuve. Ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l'agneau. »
Quelle est donc cette foule immense, en présence de Dieu, revêtus de robes blanches, comme une épouse devant son bien-aimé, lumineuse dans sa robe blanchie par le sang de l’agneau. Quelle est donc cette manière de nous parler, pour nous faire entendre ce que nous ne pouvons pas voir, ni même imaginer ?
        Dans le livre de l’Exode, il est écrit que Dieu demanda aux fils d’Israël d’égorger un agneau d’un an et bien fait, d’en prendre le sang et de le mettre sur les portes de leur maison. Ainsi serait marquée du sceau de l’amour de Dieu toute la lignée des fils d’Israël. Marqué par le sang, marqué dans la vie même qui leur a été donnée.
La nuit terrible qui suivit, tous les premiers nés des Egyptiens et de leur bétail moururent. Toute matrice vivante, ouverte par son premier enfant, fut touchée. A la fin de cette nuit, les fils d’Israël, sains et saufs, sortirent d’Egypte pour l’aventure qu’ils n’ont cessé de poursuivre, conduit par la main de Dieu.
Ceci est un signe pour nous : tout fils d’homme, né de l’homme et de la femme, créé à l’image de Dieu, porte en même temps une marque et un destin. La marque indélébile, dans sa chair, est celle de l’amour que Dieu lui porte, la marque des « enfants de Dieu ». Et, dans le même temps, le destin dans lequel il est tenu prisonnier, le destin façonné selon son époque et son pays par l’impérieuse envie de quitter le nid, de voler de ses propres ailes, de vivre de ses propres rencontres et de construire son propre monde.
        Puis est venu une autre nuit. La lumière inondait une étable à Bethléem. Un enfant nous est né. La Parole de Dieu s’est faite chair. Ce fils d’homme a révélé, jour après jour, ce qui était caché en chacun de nous, depuis la fondation du monde : la marque originaire de l’amour que Dieu nous porte, et l’ultime passion qui coule dans nos veines et nous conduit vers notre Père qui est aux cieux.
Le monde a réagi très vite. Le monde sous toutes ses formes, politiques et religieuses, a tenté d’effacer cette puissance d’amour oublié. Alors que Jésus était déjà mort, un soldat, d’un coup de lance, a ouvert son côté. Le sang de Jésus a coulé sur nous. La vie du Christ, la vie du Fils de Dieu, a lavé ce que portaient sur eux toutes les générations de la terre. La vérité était en marche désormais.
        Un jour que Jésus regardait la grande foule qui le suivait, il dit à ses disciples : « heureux les mendiants de l’Esprit, heureux les doux, ceux qui pleurent et ceux qui ont faim de justice, ceux qui ont soif de moi, et qui sont en marche vers mon Père ». Ce jour-là, Jésus voyait ce qui perçait déjà dans le secret de cette foule qu’il avait sous les yeux, et qu’il montrait à ses disciples. Il voyait en eux la marque indélébile de la tendresse de Dieu. Il voyait ce qui était « sanctifié » dès l’origine dans le fruit de l’homme et de la femme. Il voyait que les fils d’homme sont des enfants de Dieu, dès le commencement.
        Voilà ce que nous célébrons aujourd’hui : la lumière du bout de la route, qui habille depuis le début, chaque fils d’homme, l’un après l’autre, les uns comme les autres. La lumière d’origine de cette foule immense, que rien ne peut corrompre, ni la mousse de l’indifférence, ni la terreur et la violence des enfants perdus, ni l’arrogance des riches et des puissants.
Nous célébrons aujourd’hui cette foule immense : ceux qui se trouvent déjà devant le Père et le Fils et l’Esprit saint, et nous-mêmes qui marchons dans la nuit et le brouillard vers ce soleil levant qui vient nous visiter, et ceux qui viennent derrière nous et qui, à leur tour, s’efforceront de garder leurs lampes allumées.
Demain, nous reconnaîtrons, dans les pleurs et l’espérance, l’amour et la force de Jésus-Christ qui nous réunit, dès maintenant.
Jean-Pierre Duplantier

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