Des moineaux / Mt 10 26-33 / Une homélie

Rien n'est voilé qui ne sera dévoilé.
J'aurais bien aimé vous dévoiler quelque chose de ce texte... je n'y ai rien compris.

Essayons de tirer un fil : cette histoire de moineaux et de cheveux.

Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? on y apprend le prix des moineaux, leur chute sur la terre sous le regard du père, on apprend que nos cheveux sont comptés sans qu'on sache très bien pourquoi et l'on finit par apprendre que l'on vaut plus que des moineaux... ce qui, honnêtement ne nous étonne pas plus que ça.

Le moineau, c'est l'oiseau insignifiant.
Rien n'est plus semblable à un moineau qu'un autre moineau et on s’émerveille rarement à la vue d'un moineau dans nos jardins ou sur nos trottoirs.
Il est tellement insignifiant qu'il n'existe pas de tarif pour un moineau. On connaît seulement le prix d'une paire de moineaux : deux pour un sou.
Le moineau vaut un demi sou, une monnaie qui n'existe pas.
Et qui achète un moineau ? Qu'est-ce qu'il y a à manger dans un moineau ?!
Les moineaux de l'évangile, ils tombent à terre.
Moi, je n'ai jamais vu un moineau tomber à terre.
Un moineau qui tombe à terre, c'est un moineau qu'on abat.
Ils sont donc abattus et vendus pour presque rien.
Mais pas un ne tombe sans que votre Père le veuille. En fait le texte dit « pas un ne tombe sans votre père ».
Notre père, pas le père des moineaux, accompagne chaque moineau qui tombe.
Il est concerné par la chute de chaque moineau.


« Quant à vous, même vos cheveux sont comptés. »
Qui se soucie du nombre de ses cheveux ?!
Rien de plus semblable à un cheveu qu'un autre cheveu, c'est la part la plus insignifiante de nos corps, la part la plus inutile de nos corps (il y a peu de chose dans un corps d'homme dont on peut se passer sans que le corps en souffre ou en soit gêné... à part les cheveux, je ne vois rien)...
Le Père, celui qui se soucie des moineaux qui tombent, se soucie aussi du nombre de nos cheveux.

Le père se soucie infiniment du tout petit, de la part insignifiante, de ce que nous comptons pour rien.

On nous dit : « ce texte est sur le témoignage, sur les disciples missionnaires qui vont sans crainte proclamer l'évangile à toutes les nations. » Mais témoigner de quoi ?
d'un message évangélique limpide, d'une doctrine solide et claire, d'une loi puisée au catéchisme, de valeurs brillantes, de révélations érigées en certitudes.

Mais l'évangile nous dit : Ce que vous allez proclamer, c'est « Ce que je vous dis dans les ténèbres,(...) Ce que vous entendez au creux de l'oreille »
Dans les ténèbres... au creux de l'oreille...
J'ai bien peur que dans les ténèbres de nos cœurs, dans les ténèbres de nos intelligences, au creux de nos oreilles encombrées du vacarme du monde, au creux de nos oreilles assourdies par nos propres discours, par nos propres voix... nous n'entendions pas grand chose.
Nous entendons au mieux du « tout petit ».
Et c'est ce tout petit qu'il nous faut proclamer.

J'ai commencé cette homélie en vous disant que je n'avais rien compris à ce texte.
Non, le creux de mon oreille n'a pas entendu grand chose de ces lignes...
Et pourtant, je suis là devant vous et j'ai l'audace de vous parler.
(...) 

Nous ne sommes devant l'Ecriture que des moineaux : insignifiants.
Mais Dieu nous apprend que nous valons plus qu'une multitude de moineaux.
Nos oreilles parfois sont sourdes, nos ténèbres sont épaisses, mais, à cause de Jésus, parce qu'il nous le demande, à cause de l'amour infini de ce père qui se soucie plus d'un de nos cheveux que nous mêmes, nous proclamons sur les toits ce que nous ignorons.


Les pauvres moineaux l'ont vu, ils sont en fêtes ;
« vie et Joie, à vous qui cherchez Dieu ! » 


Amen
Sylvain, diacre

Comment peut-il nous donner sa chair à manger ? / Jn 6 51-58 / Une homélie

« Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »
« Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » La question ne serait-elle pas plutôt comment pouvons-nous manger de la chair humaine ?
Mais dans cette manière de poser la question se cache une vraie interrogation : "Comment Jésus peut-il donner réellement sa vie ?" "Comment peut-il nous donner sa vie pour que nous vivions ?"
Et de là bien d'autres questions, "avons-nous besoin de manger la chair du Christ pour vivre ? "Mais pourquoi Jésus voudrait-il que nous vivions, vivants ne le sommes-nous pas ?" "Serons-nous sauvés ou serai-je sauvé ? "
Tentons d'y voir plus clair dans ce texte.
A la première question : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? », nous avons une réponse facile car nous sommes plutôt habitués à recevoir le corps du Christ dans le pain.
Nous communions  au corps du Christ sous la forme et l'apparence d'un petit pain rond.
Mais les contemporains de Jésus qui entendent ces mots ont de quoi être scandalisés. Ils interprètent certainement le contraire, ils se sentent invités à consommer du pain sous la forme de la chair. Et pour être précis, le terme dans le texte grec d'origine pour la chair est le mot "viande".
Et pourtant, nous qui sommes accoutumés à consommer la chair du Christ dans un bout de pain, nous devrions nous aussi nous scandaliser à l'écoute de cette parole, nous devrions être bousculés par ces paroles. Car nous aussi, nous sommes invités à consommer la chair du Christ à cet autel dans quelques instants.
Et notre chair va se mêler à celle du Christ et la sienne à la nôtre, accomplissant ainsi la parole : " Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui."
Est-ce si facile à accepter que notre ADN soit enrichi de celui dont la parole c'est fait chair ? Est-ce si facile d'accepter  de perdre un peu de notre identité pour être englober dans un corps qui nous dépasse ?
"Comment Jésus peut-il donner réellement sa vie ?" "Comment peut-il nous donner sa vie pour nous vivions ?"
Jésus annonce un peu mystérieusement que sa vie vraiment il va la donner, il va la donner sur la croix. Sur la croix, il trouve la force de se tourner vers le Père parce que le Père demeure en lui et lui dans le Père.
Jésus qui est pleinement Christ, lui le ressuscité, lui le vivant, est la révélation que nous sommes appelés à vivre en Dieu. Notre destinée, notre perspective, c'est d'être incorporé pleinement au corps du Christ. Notre chair sera dans la chair du Christ.
Rappelons-nous le prologue de l'Evangile de Jean : "Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, la gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité."
Jésus, la parole incarnée s'est adressée aux hommes. Cette parole a touché la chair de ceux qui l'entendaient. Il y avait de l'acceptation, il y avait du refus, mais dans tous les cas, la chair était touchée.
Jésus, la parole incarnée s'adresse aux hommes. Cette parole touche encore aujourd'hui la chair de ceux qui l'entendent. Il y a de l'acceptation, il y a du refus, mais dans tous les cas, la chair est touchée.
C'est dans le parcours du Christ qui va de l'incarnation à la résurrection que nous sommes appelés à nous convertir.
Dans un instant comme je le disais, nous sommes invités à communier au corps du Christ. Chacun de nous reçoit une hostie. Je vous invite tous à méditer que dans cette hostie toutes la chair du Christ y est contenue. Et nous devons comprendre que celui ou celle qui me précède ou me suit communie au même pain. Nous devons réaliser que cette communion n'est pas seulement une communion personnelle au Christ mais que nous tous de cette assemblée sommes incorporés au Christ de la même manière et qu'un lien fraternelle se noue entre nous.
Mieux encore, ce grand mouvement dépasse les murs de cette église. Tous les chrétiens qui dans un élan de foi tendent leur main pour recevoir le pain sont du Christ quand ils mangent sa chair.
Plus large encore, les hommes qui tendent leur main pour un euro à la sortie de l'église doivent se sentir appelés dans ce mouvement par notre attitude.
Toute femme et tout homme qui aspirent à la vie éternelle doit se sentir acceptés dans cet appel.
Nous communions au Christ pour nos frères chrétiens d'orient qui ne peuvent célébrer la messe. Nous communions au Christ pour celui qui n'a jamais reçu l'Evangile. Nous communions au Christ pour nos frères musulmans qui veulent la paix. Nous communions au Christ pour les hommes de bonne volonté et pour ceux que le péché défigure.
En fait nous communions pour le salut du monde, ainsi la question : "Serons-nous sauvés ou serai-je sauvé ? " trouve sa réponse, c'est ensemble que nous aurons la vie éternelle.
Ô bon Pasteur, notre vrai pain,
ô Jésus, aie pitié de nous,
nourris-nous et protège-nous,
fais-nous voir les biens éternels
     dans la terre des vivants.

Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.