Dominique Bourgoin nous a parlé dimanche dernier du témoignage de Jean-Baptiste comme d’un surgissement.
Les textes de ce dimanche continuent à nous mettre en face de cette irruption de l’Esprit de Dieu en nous.
Les textes de ce dimanche continuent à nous mettre en face de cette irruption de l’Esprit de Dieu en nous.
Le prophète Isaïe d’abord : « L’Esprit de Dieu est sur moi » Chaque jour, je cours, je m’agrippe à la vie ; j’en profite ou je lâche prise. Je fais ceci et cela, je prie, je travaille, j’écoute, je dors, je mange. Et puis soudain autre chose m’arrive : le sourire d’une femme, un homme qui prend la main d’un enfant pour traverser la rue, une conversation, où un rayon de soleil se glisse entre les gens. Et, d’un coup, sans savoir comment, l’ordinaire des jours se charge de respect, de mystère, de joie. C’est comme le vent ! tu entends sa voix et tu ne sais ni d’où il vient ni où il va : ce moment devient un instant de jubilation, un cadeau, sans contrepartie. Certains retournent dès que possible à la réalité des choses. D’autres se risquent à y reconnaître la présence de Dieu, et la laissent creuser en eux le désir qu’Il revienne. Parfois elle s’installe en nous, y plante sa tente. Alors nos moindres gestes ou paroles ne sont plus seulement réfléchis, généreux et organisés. Ils sont habités. Alors, quand nous visitons un malade ou une famille voisine dans le besoin, nous n’allons pas forcément leur porter la guérison ou la solution à leurs problèmes ; nous faisons ce que nous pouvons ; mais tout est prêt entre nous pour que passe un peu de lumière, un instant de grâce, entre nous, de la part de Dieu. Quand Isaïe écrit: « L’Esprit de Dieu est sur moi », c’est de ce surgissement qu’il parle. Il raconte quel effet cette irruption a sur lui. Il voit et entend comment, à travers lui, passe chez les malades, les prisonniers, les abandonnés, les perdus, un souffle d’espérance, qui redonne de la couleur à la lumière allumée en chacun dès l’origine. Il voit comment cette lumière sort de sa cachette et brille à nouveau dans nos corps malmenés. C’est de cela que Jean Baptiste parle à nouveau.
Dimanche dernier, nous avons entendu que ce témoin de la lumière nous appelé à nous préparer à cette venue. Aujourd’hui, par l’évangile de Jean, nous voici appelés à « redresser nos chemins. »
Comme on redresse la trajectoire de sa voiture. Nous avons appris en effet, parfois durement, que les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées et que ses chemins ne sont pas nos chemins. Nous avons constaté que le courant ne passait pas bien entre Dieu et nous. La trajectoire de notre route emprunte souvent des déviations insolites, des sens interdits, des coups de volant intempestifs et dangereux. Dans les détails de notre vie quotidienne, dans nos jugements et nos comportements, mais aussi dans certains choix plus larges qui ont fini par orienter notre vie dans son ensemble, notre conduite est devenue chaotique. Ce n’est plus la parole de Dieu qui décide de nos itinéraires.
Comme il est peu probable que Dieu change ses chemins pour s’adapter aux nôtres, il nous faut donc redressez les nôtres pour suivre les siens. Oui mais il y a des lustres que nous essayons de nous convertir. Il y a bien une toute petite élite qui semble y réussir. Mais pour le commun des mortels, ce n’est pas gagné. Là est précisément le cri de Jean-Baptiste dans le désert : Ce n’est pas nous qui allons enlever notre péché, mais il vient Celui qui va le faire.
Ceci est la bonne nouvelle. Jésus-Christ est vraiment performant dans notre métier d’homme : Il entretient le feu, l’amour, la justice, la jubilation, l’espérance. Il est le prototype de l’homme à l’image de Dieu ; il est son fils unique, son bien-aimé : aucun obstacle ne vient chez lui masquer le surgissement de l’énergie de Dieu, de son amour pour nous, de sa vie.
Notre chemin désormais c’est de le suivre. L’obéissance à la loi, quel qu’elle soit, nous apprend nos limites, et rien de plus : il y a toujours le bien que je voudrais et que je ne fais pas et le mal que je ne voudrais pas et que je fais. Le suivre, c’est autre chose : c’est se laisser prendre par la main, le suivre des yeux, le suivre avec nos oreilles ? Car il est vivant, en chair et en os, comme il disait aux apôtres le matin de sa résurrection. Il parle vraiment à travers les paroles de ceux qui le suivent ; il agit vraiment à travers les gestes de ceux qui lui ont ouvert la porte de leur vie.
Le suivre c’est d’abord la pratique de la communion. Communion vient de commun. Or ce que nous avons en commun, ce n’est pas d’abord nos intérêts, nos biens, nos compétences, nos projets. Ces ressources communes-là ne forment que des familles, des clans, des partis. C’est bien, utile, mais çà fabrique toujours des frontières. En deçà c’est chez nous et on s’entend plus ou moins bien. Au-delà ce sont les autres, souvent des concurrents, voire des adversaires. Ce qui est commun chez ceux qui suivent Jésus est vraiment commun à tous les hommes ; c’est la petite lumière que Dieu a allumé en nous dès le commencement. Et cette lumière-là rien ni personne ne peut l’éteindre. Elle demeure, prête à sortir de sa cachette. La communion c’est apprendre à voir cette lumière qui perce à certains moments chez les uns et les autres. La communion c’est un homme qui voit et entend que sa femme apprend à se calmer. Et çà le réjouit ; il suffise qu’il réalise que c’est peut-être le Christ qui est en train de la transformer. Il a alors sous les yeux de quoi lui dire merci et son amour pour sa femme change de dimension. La communion c’est une femme qui découvre que son mari se met à s’intéresser à ses enfants. Pour elle aussi cela change sa relation avec Dieu et son homme. La communion c’est avoir des yeux et des oreilles pour percevoir ce qui vient du Seigneur, physiquement, concrètement, chez ceux qui nous entourent.
Le suivre c’est aussi prendre le temps de le connaître en parcourant ensemble les récits où nous sont montrés comment Jésus résiste aux principales tentations humaines, sa capacité à voir ce qui est en souffrance chez les autres, sa manière de soigner nos blessures, sa façon de vivre constamment tourné vers son Père. Cela ne s’invente pas, çà s’apprend tout au long de la vie, parce qu’on ne connait pas la vie de la même façon à 10 ans, 20, 40 ou plus. Ce n’est pas une pratique d’intellectuels, parce qu’il ne s’agit dans ces récits que de situations concrètes, d’hommes et de femmes en chair et en os dans lesquels il n’est pas difficile de se reconnaître. Cette pratique n’est pas en option chez les chrétiens, c’est l’une des premières décisions à prendre pour le suivre, Lui, son chemin, et pas seulement des valeurs et des principes.
La troisième offre du Christ, c’est la fraction du pain, la messe, et les prières. Là, c’est Lui qui prend les rênes, pour nous faire vivre ce qui est encore voilé chez nous, pour que sa vie prenne chair en nous, ne serait-ce qu’un moment, mais réellement, en attente de Lui, d’être rassemblés en Lui.
Voilà ce que, chaque année, nous entendons, nous célébrons à Noël et durant l’Avent. Je vous souhaite de profiter au mieux de ce surgissement de la lumière de Dieu dans nos corps. Prions ensemble les uns pour les autres.
Jean-Pierre Duplantier
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