la
première phrase du psaume claque comme un ordre. Plus
qu’un conseil, un commandement. Ce
matin, nous sommes sommés de chanter au Seigneur un chant inédit,
jamais entendu auparavant, inouï.
S’il
y a bien un jour, une fête, où l’on refuse catégoriquement de
chanter un chant nouveau c’est bien noël. Nous
venons chercher avec avidité les vieux chants de notre
enfance, certains même ne viendront à la messe qu’une fois dans
l’année, aujourd’hui, (je
les salue) simplement pour se
donner le plaisir de chanter les vieilles rengaines increvables sans
lesquelles Noël ne serait pas Noël.
Qu’est-ce
qui explique que l’Ecriture exige de nous ce chant nouveau ?
Ce besoin impérieux de nouveauté ?
Parce
que ce qui s’est passé cette nuit ne devrait pas pouvoir se fêter
avec de l’ancien, avec du déjà vu. Ce qui s’est passé cette
nuit ne rentre pas dans nos vieilles prières, dans notre vieux
langage.
« Chantez
au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles »
Cette
nuit, il a fait des merveilles,
Cette
nuit un enfant nous est né,
Cette
nuit, le Verbe s’est fait chair pour habiter parmi nous
Cette
nuit, nous sont données la grâce et la Vérité
Ce
matin, nous sommes condamnés à la nouveauté à cause d’un
nouveau-né.
Nous
ne célébrons pas ici le gentil folklore, la belle histoire, le beau
conte de fée. Il n’y a aucun lien entre ce que nous célébrons
ici dans cette église et ce qui se célèbre dehors, sur cette place
toute parée de jolies guirlandes scintillantes, de beaux sapins et
de traîneaux… Dehors : le vieux Noël, le déjà vu, la
répétition implacable du même. Dedans : le surgissement d’une
nouveauté radicale, la déflagration de la plus grande révolution
de notre humanité : Dieu
se fait homme !
« Le
Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous »
Désormais,
le monde est habité, désormais,
chacun de nous, chaque chair, est habitée
L’enfant
de la nuit de Noël instaure le lieu de la rencontre. Il permet la
folie de l’intime de Dieu avec nous, pas
en discours, pas en esprit, dans
la chair.
L’enfant
de la nuit de Noël nous retire de la Loi et nous offre la grâce et
la Vérité.
La
grâce, c’est le don absolu
et absolument gratuit de Dieu. Et que donne-t-il ? Il
se donne lui-même.
On
ne cesse de nous répéter que notre chair n’est que viande, que
notre chair n’est que mécanique plus ou moins en bon état, plus
ou moins bien entretenue, plus ou moins proche de la casse…
Mensonge !
La
vérité, c’est que notre chair est gracieuse. Elle a la haute
dignité du choix de Dieu. Il s’est penché vers elle, il l’a
désiré et il est venu s’en saisir… gracieusement.
Chantez
au Seigneur un chant nouveau, parce que ce matin, à cause de
l’enfant nouveau-né, nous sommes des hommes nouveaux et des femmes
nouvelles.
Cet
enfant déracine l’ancien… il ne vient pas restaurer des
vieilleries, il ne vient pas sauvegarder le même, il ne vient pas
asseoir des traditions, il exige que nous le suivions dans la
nouveauté radicale de son chemin. Que nous soyons disponibles pour
mettre nos pas dans les siens sur un chemin que nul n’a jamais
emprunté avant lui. Le chemin qui nous fera traverser les ravins de
la mort à la suite du premier-né d’entre les morts.
Mais
nous résistons à consentir à la grâce… Nous préférerions un
échange marchand, un contrat d’assurance. Nous préférerions que
son habitation en nous soit une copropriété… pour rester maître
en la demeure… Nous sommes terrifiés par la nouveauté
Ce
n’est pas si grave, un jour, c’est le chant nouveau qui nous
saisira, il viendra de lui-même à nos lèvres. Le chant nouveau du
Royaume, il est à venir, il est en promesse. La vie sacramentelle
nous en donne un avant-goût, nous en fait entrevoir la Joie.
En
attendant, réjouissons-nous, réjouissons-nous avec nos vieux
chants, avec nos vieilles prières, avec notre vieux langage… c’est
tout ce que nous avons pour le moment.
« Le
Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu
sa gloire,
Tous, nous avons eu part à sa plénitude, nous avons
reçu grâce après grâce »
que
cela fasse de nous ce matin des chairs nouvelles capables de chants
nouveaux
Joyeux
Noël
╬ Amen
Sylvain
diacre

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