Femme, où sont-ils donc ? / Jn 8 1-11 / Une homélie

"Femme, où sont-ils donc ?" Interroge Jésus, pour la première fois quelqu'un parle à la femme, pour la première fois, on lui reconnaît son humanité.
Cette femme, humiliée, traitée comme un objet, réduite à une faute, Jésus la relève. Il s'adresse à elle personnellement, il lève les yeux vers elle en se redressant pour lui parler, non pas d'en haut comme un accusateur, mais de plus bas comme pour lui rendre sa dignité.
Trois idées simples dans ce passage peuvent nous aider à convertir notre cœur pour laisser venir le royaume des cieux pendant ce temps de carême.
Comme Jésus, nous sommes appelés à ne jamais réduire une personne à sa faute.
Ensuite, Jésus nous invite à ne jamais retirer la dignité à qui que ce soit.
Enfin, la juste place n'est pas d'être en-haut, Jésus nous invite à lever les yeux sur nos frères.
La faute.
Dans l'Evangile d'aujourd'hui, on sent la mauvaise foi, voire même la haine, s'exprimer au grand jour. On décèle également, un comportement à l'évidence machiste. La foule des hommes, composée de scribes et de pharisiens, focalise son propos sur Jésus. On les imagine traîner cette pauvre femme comme on brandit une pancarte. On la désigne, non pas comme un être humain, mais par ce qu'elle a prétendument fait. Je dis : "prétendument fait" parce qu'on ne cherche même pas à comprendre.
Aujourd'hui, des femmes sont stigmatisées de la même manière. Sommet de l'hypocrisie des femmes sont pointées du doigt par des hommes alors qu'elles sont victimes de la violence des hommes.
Cette femme est muette, elle est écrasée par le péché que la foule charge sur ses épaules, c'est violent. Que peut-elle faire seule contre tous ? Elle ne peut que ployer.
Nous même, ne cédons-nous pas à ce genre de comportements dans nos médisances ? Et nous les hommes, combien de fois avons-nous regardées des femmes en les réduisant à un seul objet de désir ?
Chez, Jésus, rien de cela, à l'écoute des accusateurs, il se baisse comme pour se charger d'une part de ce que porte la femme. S'il ne semble pas porter le regard sur la femme, c'est peut-être parce que ce n'est pas une femme qu'on lui présente mais un slogan, parce qu'on lui retire toute dignité.
La dignité.
"Il était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire. Méprisé, abandonné des hommes, homme de douleurs, familier de la souffrance, il était pareil à celui devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisé, compté pour rien." Si je vous lis ce passage d'Isaïe, c'est parce qu'il peut s'appliquer à cette femme à qui on a retiré toute dignité.
Elle était sans apparence ni beauté qui attire nos regards, son aspect n’avait rien pour nous plaire. Méprisée, abandonnée des hommes, femme de douleurs, familière de la souffrance, elle était pareille à celle devant qui on se voile la face ; et nous l’avons méprisée, comptée pour rien.
Ce passage dont on dit qu'il préfigure le Christ souffrant, peut s'appliquer également à cette femme.
Mais Jésus rompt la spirale infernale. Jésus va rendre sa dignité à cette femme. Il va s'adresser à elle et il va lui reconnaître sa valeur qui lui rend sa beauté, il va l'appeler "femme".
Combien de fois détournons-nous le regard devant celui ou celle pour qui le Christ, notre frère, est mort sur la croix ?
Jésus, lui, il lève les yeux sur la femme.
Jésus, celui que ses disciples appellent "maître", ne se place jamais au-dessus quand il s'adresse à une personne.
C'est seulement pendant sa passion, que Jésus va s'adresser aux hommes de plus haut. C'est seulement quand, il est dressé sur la croix, alors qu'il agonise, qu'il regarde le monde d'en-haut et qu'il l'attire à lui comme pour le tirer de son péché.
Jésus, c'est le Dieu qui s'incarne et qui désigne le Père comme un Père miséricordieux. Jésus, le vivant, est venu nouer une alliance définitive avec sa créature. Nous, les hommes, ne pouvons plus regarder vers le ciel en implorant un Dieu vengeur de retenir sa main pour nous punir.
Notre Dieu partage notre condition et surtout il ne nous regarde pas du ciel comme des misérables. Jésus, notre frère lève les yeux sur nous. Il se situe au plus bas et il contemple en nous cette part qui appartient à Dieu et qui tressaille quand il passe.


«Ne faites plus mémoire des événements passés,
ne songez plus aux choses d’autrefois.
    Voici que je fais une chose nouvelle :
elle germe déjà, ne la voyez-vous pas ?


Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.

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