Ici, on sait combien
le travail de la vigne est dur. On sait ce que c'est que travailler
une journée entière aux intempéries, courbé devant la vigne pour
en prendre soin.
La situation décrite dans l'Evangile de ce dimanche est toujours
d'actualité. Chaque jour, des femmes et des hommes sont embauchés
pour la journée. Parfois, ils travaillent au noir pour un petit
salaire. Alors, il n'est pas question dans le contrat de travail de
cotisation pour la protection sociale ou la retraite et encore moins
de taxe sur le travail.
Et, comme à toutes
les époques, le journalier loue ses bras pour nourrir sa famille.
Plus même, il propose sa force de travail pour ne pas se sentir
retrancher de la société des humains.
Cet homme-là
connaît la valeur du smic horaire, 9,53€. Alors quand après avoir
travaillé 8 heures de rang, il touche autant que celui qui n'a
travaillé qu'une heure, il a de quoi récriminer. Le dernier
embauché reçoit une pièce d'argent, le premier se voit bien en
recevoir au moins 8 ou 9.
Logique, Le travail
est une valeur comme, au même titre que le m2 de terrain, que le
litre de gasoil, que la prestation intellectuelle ou le lingot d'or.
Et une valeur cela se multiplie ou se divise. On peut lui appliquer
des opérations arithmétiques.
Ma perplexité a
grandi lorsque j'ai lu cette phrase "
Prends ce qui te revient, et va-t'en".
Comment le Christ peut-il nous enseigner que le royaume des cieux est
comparable à un maître qui dit à un de ses employés "
Prends ce qui te revient, et va-t'en"
? Quand bien même, cet employé proteste. Car il proteste avec son
intelligence, il raisonne avec ce que le Seigneur lui a donné, sa
capacité à calculer. Bon sang, mais c'est juste de recevoir neuf
fois plus quand on a travaillé neuf fois plus !
Curieusement, ce qui
a dénoué mon incompréhension, ce sont les mathématiques
elles-mêmes. Une pièce d'argent n'était-ce pas beaucoup pour une
journée de travail ? Une pièce d'argent cela ne suffit-il pas à
prendre soin d'une famille pour longtemps ?
Il y a comme une
promesse d'abondance à travailler pour le Royaume des Cieux. Tout
devient plus clair à la lumière du don de Dieu. Que peut-on
recevoir de plus que l'abondance de l'amour de Dieu ? Cela a-t-il un
sens de recevoir neuf fois plus de l'amour de Dieu ? L'infini
multiplié par neuf c'est toujours l'infini ?
Cela rappelle, le
texte de l'exode dans l'épisode de la manne :
"Celui qui en avait ramassé
beaucoup n’eut rien de trop ; celui qui en avait ramassé peu
ne manqua de rien. Ainsi, chacun en avait recueilli autant qu’il
pouvait en manger" (Ex 16, 18)
On peut facilement
imaginer qu'après des jours de privation dans le désert, les
hébreux se sont précipités sur ce pain venu du ciel pour se gaver
jusqu'à satiété. Là encore le don de Dieu était ni trop ni trop
peu, juste ce qu'il faut pour vivre en homme digne.
La pièce d'argent
c'est le salaire que chacun d'entre nous reçoit quand il travaille à
la vigne du Seigneur. Car il n'y a pas de plus grande récompense que
la joie de servir le Seigneur, que la joie de laisser venir
l'Evangile se répandre dans le monde.
Annoncer l'Evangile,
c'est le rôle qui est assigné à chaque baptisé qui reçoit le don
de prophète.
Lors de notre
baptême, le Seigneur est sorti au petit jour pour nous embaucher à
sa vigne. Nous avons accepté le contrat qu'il nous proposait, à
savoir le don de la vie qu'il nous a fait ce jour. Ce jour où nous
avons été plongés dans la mort et la résurrection du Christ, nous
sommes déjà ressuscités pour la vie éternelle. A quoi bon
recevoir neuf fois la vie éternelle quand une fois la vie éternelle
suffit ?
Il y en a qui sont
baptisé bébé, d'autre au soir de leur vie et tous reçoivent
l'abondance de la vie du Seigneur, tous nous sommes sauvés du péché
qui nous pousse au calcul, à l'envie et à la comparaison.
Je voudrais
maintenant m'adresser aux non baptisés. Il y en a peut-être dans
l'assemblée. Ne tardez pas à venir à la rencontre du maître de la
vigne ! La joie que procure le soin de la vigne du Seigneur est
immense car c'est à ce jour que vous recevrez le salaire du Royaume
des cieux. Lors de la rencontre du Seigneur au moment du baptême,
vous entendrez "Car mes pensées ne sont pas vos pensées,
et mes chemins ne sont pas vos chemin." Et cette parole
vous délivrera de tout ce qui vous englue dans les logiques
arithmétiques du monde.
Seigneur Jésus, toi
qui as répandu ton sang pour la multitude, montre-nous le chemin de
ta vigne où les pauvres attendent avec espérance l'annonce de ton
Evangile.
Père, toi qui fais
tout homme à ton image, donne-nous la force de sortir au petit jour
pour travailler à ta vigne.
Esprit-Saint, toi
qui visites les baptisés, ravive en nous la joie de notre baptême.
Amen !
Dominique
Bourgoin, diacre.
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