Jésus, le beau Dieu, si bon,
si doux, si puissant, si plein d’amour, Jésus est mort, défiguré,
humilié sur la croix, on l’a mis dans un trou, on a posé une
pierre dessus.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
Les disciples si lents à
comprendre, si lents à croire, les disciples missionnaires
s’enferment, minables et lâches, ils ont posé une pierre sur
leurs illusions.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
Les femmes viennent à l’aube
profonde caresser un cadavre, parfumer un mort, dans la honte de ne
pas l’avoir fait le jour qu’il fallait, d’avoir préféré la
loi au soin de celui qu’elles aimaient. Elles ont posé une pierre
sur ce corps abandonné.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
Le monde est en guerre, des
peuples se déchirent, on bombarde, on rase des villes, on torture
des otages, on s’envoie des drones, on tue les enfants et les
vieillards. Sur tout espoir de paix, le monde a posé une pierre.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
Nous avons choisi l’argent.
Sur les arbres, sur les fleuves et les ruisseaux, sur les bêtes et
les bestioles, sur l’air qu’on respire, on a choisi le pétrole,
la clim, l’avion, la grosse voiture et le steak. Sur la nature, on
a posé une pierre.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
On a élu des fous, on choisit
des tyrans, parce qu’on veut de l’ordre, parce qu’on veut
défendre son grand écran, sa grosse voiture et son steak. Sur la
démocratie, sur la justice, on a posé une pierre.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
On a enlevé la joie à nos
enfants. On leur a mis des angoisses de réussite, on leur a mis du
parcoursup et des horizons bouchés, on leur a interdit l’espérance,
on leur a mis des réseaux pour ne plus se parler, on leur a cloué
un téléphone dans la main. Sur nos enfants, une pierre est posée.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
On a mis l’Église dans un
trou. Un trou de silence pour que rien ne se dise de sa crasse et de
ses mensonges. On a mis des mosaïques pour décorer le trou, de l’or
et de la dentelle, de la tradition et des valeurs. Et l’Église
pourtant si belle, s’est mise à sentir la mort.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
On a fait des prêtres
fatigués. On les a éclaboussés d’abbé Pierre et de Bétharam,
on a mélangé les saints et les tarés. On a fait des évêques
pétris de peur, des diacres tristes et transparents. Sur nos
vocations on a posé une pierre
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
On a roulé une pierre sur nos
chairs, on a couvert nos corps. On a dit que c’était triste de
vieillir, on a dit que la maladie nous humiliait, qu’il valait
mieux mourir, que c’était plus digne. On a dit qu’un corps
différent c’était un corps exclu, on a jeté des pierres sur des
chairs amoureuses de leur semblables.
Sur nos corps comme ils sont,
on a posé une pierre.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
Sur nos vies on a posé la
pierre de nos échecs.
la pierre de nos deuils
la pierre de nos désarrois
la pierre de nos petits
arrangements, de nos colères imbéciles, de nos regrets si lourds.
Mais la pierre est roulée
et le tombeau est vide
C’est pour ça que nous
sommes là dans la profonde nuit
C’est parce que la pierre
est roulée et que le tombeau est vide
C’est pour ça que nous
croyons,
C’est dans le mouvement de
la pierre qui se roule, c’est dans le vide du tombeau que nous
sommes baptisés, c’est notre fondation, c’est notre source,
c’est notre horizon et c’est notre Joie.
C’est dans cette ouverture
et ce vide que vous allez maintenant être baptisés.
Le terrain est penché, la
pierre toujours veut revenir à sa place.
Le diable et le monde
travaillent sans relâche à la replacer, à remplir le tombeau.
Le diable et le monde nous
disent qu’à la fin le tombeau doit être plein et que c’est la
pierre qui gagne.
Il faut la nuit de Pâque, il
faut le torrent de la voix de l’Ecriture, il faut le feu la flamme
et l’eau, il faut nos chants, nos corps côte à côte, coude à
coude, pour que la pierre à nouveau libère le vide du tombeau.
Devant l’éternelle pierre,
il faut des alléluia qui soient des cris, des alléluia qui
dynamitent la pierre qui menace sans cesse de faire machine arrière.
La pierre est roulée, le
tombeau est vide, le Christ est ressuscité, il est vraiment
ressuscité.
╬ Amen Alleluia !
Sylvain diacre
Email de Christophe Mirande
Nous étions tous restés clouer en écoutant ce sermon. Oui, la pierre est roulée mais menace de revenir nous empêcher de voir le tombeau vide... Merci beaucoup Sylvain.
RépondreSupprimer