« Faire une lecture » ou « Proclamer la Parole de Dieu » ?

     Quand nous préparons nos célébrations, il arrive souvent que nous demandions à tel ou tel « est-ce que tu veux bien faire une lecture ? ».
« Faire une lecture » laisserait entendre que l’exercice consiste à se rendre à  l’ambon pour lire à voix haute un texte de la Bible écrit dans un livre. On n’attendrait rien de plus à celui ou celle qui s’acquitte de cette tâche que de « savoir lire », c’est-à-dire savoir déchiffrer des caractères imprimés sur du papier pour les transformer en sons articulés et donc, faire entendre un texte.

Pourtant, quelques indices devraient nous alerter :
- Le premier, le plus évident, c’est d’abord le lieu de cette lecture. Les lectures se font depuis l’ambon, ce pupitre de pierre posé en haut des marches. Le missel précise dans sa présentation : « La dignité de la parole de Dieu requiert qu’il y ait dans l’église un lieu adapté à sa proclamation et vers lequel, pendant la liturgie de la Parole, se tourne  spontanément l’attention des fidèles. (...) C’est uniquement de l’ambon que sont proclamés les lectures, le psaume et l’annonce de la Pâque ; on peut aussi y prononcer l’homélie et les intentions de la prière universelle. La dignité de l’ambon exige que seul le ministre de la Parole y monte. » PGMR n°309
« Ambon » signifie « monter » …

 - Le deuxième se manifeste à la fin de chaque lecture : quand le lecteur précise à l’assemblée : « Parole du Seigneur » et que l’assemblée répond « Nous rendons grâce à Dieu ».
Voilà qui est très clair : ce que nous venons d’entendre n’est pas la lecture d’un texte, ce n’est pas de l’écrit, mais c’est de la Parole. Et ce n’est pas la parole de celui qui vient de lire, mais la Parole de Dieu. Et c’est parce que nos oreilles ont entendu que c’est Dieu qui vient de parler que nous lui rendons grâce !
    Le Concile Vatican II écrit dans la constitution sur la liturgie (n°7) cette phrase stupéfiante : « le Christ est toujours là auprès de son Église, surtout dans les actions  liturgiques. (...) Il est là présent dans sa parole, car c’est lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures. »
    Nous ne sommes pas une religion du livre, nous mettons notre foi dans la Parole d’un vivant qui ne cesse de nous parler. L’ambon est la table où la Parole nous est donnée en nourriture (St Jérôme écrira que lorsque nous écoutons, « c’est la Parole de Dieu et la chair du Christ et son sang qui tombent dans nos oreilles »).  
 
    On comprend alors que le lecteur ou la lectrice fait bien plus que «faire une lecture» !  il donne sa voix à celui qui parle réellement : le Christ lui-même ! Sa responsabilité, c’est donc de ne rien faire perdre de la Parole, que pas une miette ne se perde : tout doit être entendu ! Son travail de lecteur consiste à « ressusciter » le texte écrit, le texte mort, pour le laisser advenir comme parole vivante » (P. Pretot). Il ne lit pas pour se faire  entendre, ni pour faire entendre un texte, mais pour faire entendre un Autre que lui. « La lecture de l’Écriture est constituante de l’assemblée, instituée en position d’auditeur, et tous les participants se trouvent concernés. La lecture n’est pas la restitution orale d’un texte écrit, mais le travail d’écoute qui permet au texte de faire son chemin dans l’oreille et le cœur des auditeurs », car comme le dit St Paul, « la foi naît de ce que l’on entend » (Ro 10-17). 
 
     En liturgie, personne ne « fait une lecture » ! mais, comme lecteurs et lectrices, nous sommes bien convoqués à être « Ministres de la Parole »,  chargés de « proclamer la Parole de Dieu » !
et alors, « Nous rendons grâce à Dieu ! »
Sylvain, diacre.

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