La situation est-elle
bloquée ? Rien ne peut-il sauver cet inconnu et ses cinq frères ?
Contemplons d'un peu
plus près le texte et laissons-nous surprendre par certains aspects.
Notamment, regardons ce qui s'oppose. En premier lieu, l'homme riche
ne porte pas de nom tandis que le pauvre a une identité. Puis,
regardons les disproportions, l'homme riche vit dans l'opulence
extrême tandis que Lazare se contenterait d'un rien, seulement des
miettes qui tomberaient de la table. Et plus loin, Lazare vit dans la
consolation et le bonheur à côté d'Abraham (le père des croyants)
tandis que l'homme se contenterait du bout d'un doigt humide pour
rafraîchir son gosier.
Certes, nous pouvons
bien dire que cet homme est plutôt égoïste. Nous pouvons souligner
qu'il ne voit pas la misère à sa porte. Nous pouvons noter son
manque de sens du partage.
Mais Lazard qu'a-t-il
fait dans sa vie, nous ne le savons pas. Nous pourrions dire qu'il
n'a pas été égoïste mais Jésus ne dit rien de cela. Alors,
probablement, que ce n'est pas là que se situe l'enseignement. Ce
n'est pas dans le choix d'une vie édifiante que veut nous entraîner
la parabole. Peut-être, nous invite-t-elle à chercher plus profond,
plus loin au fond de nous.
L'homme riche est
condamné, rien ne le sauvera. L'abîme est infranchissable. Cela est
surprenant surtout quand on sait que Jésus ne cesse de nous parler
de la miséricorde de son Père et nous savons par notre expérience
humaine, qu'il n'y a pas de vie totalement mauvaise et qu'il n'y en a
pas non plus de totalement bonne.
Nous avons relevé que
l'homme riche vit dans l'opulence. Il vit à l'abri du besoin et pire
encore il vit sans avoir faim. Il vit sans désir d'autre chose que
la satisfaction de ses besoins triviaux. Lazare, lui, à la porte
aspire à du peu. Il ne rêve pas du trop. Il demande juste quelques
miettes.
Une fois passé par la
mort, que demande l'homme ? Il aspire aux mêmes besoins. Et que
reçoit Lazare, au ciel, il reçoit la consolation. Il vit dans la
relation.
Par cette parabole,
c'est comme si Jésus nous indiquait que la faim est bonne. Une faim
particulière, une faim qui ne se rassasie pas de nourriture mais
d'un pain qui est relation.
L'attitude de l'homme
riche nous la connaissons, tous nous avons cherché et nous cherchons
encore à satisfaire une soif de pouvoir, à amasser, à nous
contempler nous-même. Nous oublions que cela ne suffit pas à
construire un homme. Tandis que, parfois comme Lazare, connu de Dieu
par son nom, une faim se creuse en nous. Parfois se réveille en nous
un manque, un manque douloureux qu'on ne sait pas combler, un manque
que nous-même ne pouvons combler, un manque qui ne se comblera
jamais. Car ce manque est infini en nous. Il y a de la place pour
l'infini en nous.
Cet infini, c'est ce
qui nous a conduits aujourd'hui ici, autour de la table du repas
auquel nous invite le Christ. C'est à cette table que nous allons
recevoir du peu, une miette de pain. Une miette de pain qui contient
tout l'amour du Père. L'amour du Père s'exprime dans le don de son
Fils, dans le pain de l'Eucharistie.
Mais ne croyons pas que
nous partirons rassasier, repus, sans désir et sans manque jusqu'à
dimanche prochain. Sinon, comme les cinq frères, nous ne serons pas
convaincus, alors ne cherchons pas la satiété.
Non, ce pain va creuser
encore plus le désir de Dieu en nous, il dilate encore plus
l'infini. Mais, ne pleurons pas sur nous qui ne serons pas comblés
mais réjouissons-nous.
Réjouissons-nous
car l'Eucharistie nous envoie en mission vers une multitude de frères
qui ne savent pas encore qu'il existe une source inépuisable à cet
autel. Alors trouvons les ressources dans ce que nous recevons du
Père pour aller à leur rencontre, pour les inviter.
Témoignons que cette
source révèle que cette faim d'infini que nous avons parfois, est
une consolation. Ne laissons pas cet inconnu dans l'ignorance.
Sachons reconnaître en lui ce manque, cette place que Dieu cherche.
Cet espace que Dieu veut visiter.
Témoignons de notre
Foi, de notre Espérance, de notre Charité et de notre
manque signe que Dieu nous cherche.
"Toi,
l'homme de Dieu, cherche à être juste et religieux, vis dans la foi
et l'amour, la persévérance et la douceur. Continue à bien te
battre pour la foi, et tu obtiendras la vie éternelle ; c'est à
elle que tu as été appelé, c'est pour elle que tu as été capable
d'une si belle affirmation de ta foi devant de nombreux témoins."
AMEN
!
Dominique
Bourgoin
26° Dimanche du Temps ordinaire –
Année C
Am 6, 1a, 4-7 ; Ps 145 ; 1 Tm
6,11-16 ; Luc 16, 19-31
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