Les premiers chrétiens se réunissent en cachette dans les sous-terrains de Rome et ils peignent les murs. Dans les premières représentations, avant celle du Christ-bon-berger, avant celle de la Vierge à l’enfant, bien avant celle de la croix, on voit apparaître celle d’un homme, ou d’une femme, debout, les bras étendus et les mains ouvertes. C’est la figure de « l’Homme qui prie ».
La première image des
premiers chrétiens, c’est « l’Homme qui prie ».
Et un Homme qui prie, c’est
un homme debout, parce qu’il est ressuscité, relevé pour
toujours, et s’il a les bras ouverts c’est parce qu’il s’ouvre
à ce qui vient, qu’il se rend disponible, qu’il se rend
vulnérable, qu’il abandonne toute protection.
Aujourd’hui, le Christ nous
rappelle qu’il est nécessaire pour nous de prier sans cesse.
Soyons bien attentifs, prier toujours, c’est d’abord nécessaire
pour nous. Avant de l’être pour ceux qui sont l’objet de
nos prières, avant même de l’être pour Dieu. S’il nous demande
de prier sans cesse, c’est qu’il est indispensable que chacun de
nous devienne « l’homme qui prie » « la femme qui
prie ».
S’il s’agit bien de cela,
il n’est pas question de se décourager parce que nos prières ne
serviraient à rien… ou ne se réaliseraient jamais… Depuis quand
doit-on conditionner nos prières à leurs degrés d’efficacité ?
Le Seigneur ne nous demande pas de vérifier que nos prières soient
exaucées, il ne nous demande pas de ne prier que quand c’est
utile… il nous demande de prier tout le temps… parce que c’est
nécessaire à celui qui prie.
Il n’attend pas que nous
fassions de belles phrases, que nous connaissions les belles
formules, que nous trouvions des intermédiaires, il attend que nous
criions vers lui jour et nuit jusqu’à l’assommer comme cette
veuve insistante assomme ce mauvais juge.
C’est si facile de tourner
en dérision nos intentions de prières… bien sûr elles sont
toujours les mêmes, bien sûr elles sont naïves ou irréalistes,
bien sûr on n’en voit pas les fruits… Mais si nous cessons de
les exprimer, nous nous mettons en danger. Si nous les faisons taire
du haut de notre orgueil, nous trahissons ce que nous sommes :
ces hommes et ces femmes debout, bras ouverts, créés pour la
prière.
Alors c’est difficile de
tenir debout bras ouverts en tout temps. C’est un combat. Tout ceux
qui prient savent que la prière est un combat.
Observons Moïse en son
combat : debout, les bras levés, il fatigue. Ses bras se font
lourds, et quand il baisse les bras, le combat est perdu.
● D’abord il va s’asseoir
sur une pierre.
Nous aussi, pour prier sans
cesse, asseyons-nous sur une pierre.
La pierre d’angle, la pierre
qui soutient toute notre vie de prière. Asseyons-nous sur l’autel.
Soyons clairs, ne venez pas vous asseoir sur cet autel la prochaine
fois que vous prierez, ce que je veux dire c’est que l’autel est
l’assise de toute prière.
Vous vous souvenez des mots de
la prière de dédicace de l’autel :
« Qu’il soit la
table du Seigneur où ton peuple viendra refaire ses forces. »
« sources des
sacrements »
« Qu’il soit la
table de fête où les convives du Christ afflueront en se
déchargeant sur toi de leurs soucis et de leurs fardeaux »
● Ensuite, les bras de Moïse
seront soutenus.
Que nos bras soient soutenus
eux aussi pour ne pas faiblir.
Un bras soutenu par mes frères
Un bras soutenu par les anges
Comment prier sans mon frère ?
Comment croire que je peux prier seul ? Sans les frères et les
sœurs que le Père m’a donnés ?
Et comment prier sans la
Parole elle-même, sans les mots de l’évangile ? sans le
concours des mots même de Dieu ? Comment tenir sans le soutient
de l’écriture quand on la laisse devenir réellement la voix des
anges ?
Un saint* du XVème
siècle écrivait : « Dieu a fait que la prière ait un
goût tel qu’on y aille comme à une danse, et il a
fait que la prière ait un goût tel qu’on y aille comme à un
combat ».
Ne craignons ni la danse, ni
le combat.
Soyons des hommes et des
femmes de prières sans nous préoccuper des résultats, nous ne
sommes pas des comptables, nous ne sommes pas des contrôleurs de
travaux ni des gestionnaires de biens…. Nous sommes des bras levés
jour et nuit. Nous sommes des cris insistants, inlassables dans leur
nullité, infatigables dans leur humilité.
Nous sommes ces figures
debout, les bras ouverts, créés à l’image du ressuscité.
╬ Amen
Sylvain diacre
* Nicolas de Flue
Catacombe de Priscilla IIIème siècle
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