Vendredi Saint / Un mort de plus / Une homélie

(...)
C’est une mort minable.
Chez Jean, il n’y a aucun signe extraordinaire quand Jésus meurt.
Pas de tremblement de terre, pas de rideau déchiré, le soleil continue de briller.
C’est la mort insignifiante d’un anonyme, un crucifié parmi des centaines de crucifiés, il y a 2000 ans sur un petit bout de terre d’un pays minuscule, devant la petite foule des désœuvrés de Jérusalem.
Ce n’est même pas la mort d’un héros. Il ne résiste pas, il ne proclame rien.

Pourquoi fallait-il que l’on vienne ce soir nous pencher sur cet objet atroce qu’est la croix ?
Si laide qu’elle est voilée.

Car la croix est voilée
    elle se cache à nos yeux
Elle est voilée d’abord par notre regard… Ce voile, c’est notre regard sur elle.
Ce soir, nous est donné à voir que nous ne la voyons pas, que nous ne savons pas la voir

Pour nous, la croix, c’est le lieu de la mort, c’est le lieu où le Christ est cloué pour toujours comme un papillon épinglé dans sa boite.
Mais alors, si la croix n’est que mort et défaite, que faisons-nous quand nous dessinons la croix sur le front des enfants ?
Quand nous la dessinons sur nous-même ?
Sommes-nous à ce point compromis avec la mort pour nous signer sans cesse du signe de sa victoire ?

Il va falloir que le voile tombe
Il est urgent que le voile tombe
Que la croix se donne à voir pour ce qu’elle est : vide
Méfions-nous des images
Du petit théâtre des crucifix
(...)
Sur la croix, Dieu qui est la vie, la vie toute entière, la vie véritable, la vie éternelle, traverse la mort et la traverse avec nous.
Cet homme insignifiant qui meurt sur la croix, ce n’est pas un mort de plus, c’est toute mort, c’est chacun des morts du monde et du temps.

En nous approchant de la croix, laissons-nous regarder par elle.
Tendons l’oreille à ce qu’elle nous dira :
Elle nous dira « n’ayez pas peur de la mort car la vie l’a traversée,
n’ayez pas peur de la croix car c’est par elle que la Joie est entrée dans le monde, n’ayez pas peur de vous-même car vos vies sont voilées à vous-même »
(...)

Amen
Sylvain diacre

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire