Dimanche de Pâques / Il aperçoit les linges posés à plat / Une homélie

Que dire après avoir entendu cette parole de l'Evangile de Jean ? Qui y a-t'il à comprendre ?
"Il vit, et il crut." Le premier arrivé au tombeau, le second à entrer dans le tombeau est de fait le premier croyant en la résurrection de Notre Seigneur. Marie-Madeleine qui l'a précédé au tombeau n'est pas entrée, elle s'est arrêtée à la porte certaine que le corps de Jésus a été enlevé. Pierre, lui, nous semble perplexe dans son silence et son inaction. C'est pourtant lui qui le premier pénètre dans le tombeau. Il reste sans voix tandis qu'une foi brûlante envahit Jean, une certitude le tenant solidement au corps.

Jean est le premier croyant au Christ ressuscité. Il est celui qui ne cherche pas à comprendre mais se laisse faire dans sa foi au Christ.
Et au fond de nous, naît secrètement et mystérieusement cette prière : "Seigneur donne-moi la grâce de croire dans ta résurrection aussi certainement et soudainement que ton disciple Jean."
Alors, nos yeux fouillent dans le texte et nos oreilles se tendent pour mieux comprendre.

Pierre c'est à lui que nous ressemblons le plus. Nous cherchons comme lui sans cesse à expliquer ou à déduire. Nous analysons, parfois nous nous méfions des élans de notre cœur.
Et pourtant que voit Jean pour qu'il croie si soudainement ?
Notre première réponse, Jean voit des linges disposés apparemment d'une manière étrange. Toutefois c'est ce que voit Pierre qui nous donne la description la plus précise : "il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place."
Nos esprits cartésiens, notre soif de preuves, notre besoin de comprendre logiquement, nous poussent à nous dire que Jean voit la même chose. Jean voit lui aussi les linges posés à plat et le suaire roulé à part à sa place. C'est logique.

Mais la question qui vient aussitôt : "pourquoi la disposition des linges saisit Jean au point qu'il crut aussitôt ? Et pourquoi Pierre qui pour le coup on en est sûr voit la disposition des linges, restera-t'il figer dans le silence ?
Et si Jean et Pierre ne voyait pas la même chose ?
Pierre, on vient de le préciser, voit les linges pliés et rangés d'une manière particulière.
Et si ce que Jean voyait, c'est tout simplement le tombeau vide ?
Et si Jean ignorait tout simplement les linges ?
Et si le regard de Jean traversait les linges pour ne voir que la pierre nue, froide, vide ?
Et si Jean à travers l'absence d'un corps percevait déjà une présence tout autre ?
Les linges sont les objets des soins qu'on porte à un mort, au matin de Pâques, ils n'ont plus aucune utilité. S'en préoccuper, c'est encore tourner son regard vers ce qui plonge dans les ténèbres.
L'histoire qui commence ce matin, c'est l'histoire d'un Vivant. L'histoire d'aujourd'hui c'est la victoire de la vie.

Aujourd'hui, nous nous mettons en route à la suite du Christ. Et comme nous le dit la bénédiction solennelle de la veillée pascale : "Ils sont finis les jours de la Passion, suivez maintenant les pas du ressuscité : suivez-le désormais jusqu’à son royaume où vous posséderez enfin la joie parfaite."
Alors, on comprend mieux que les vêtements mortuaires ne sont plus de ce qui nous questionne ce dimanche de la résurrection. Ils sont du passé. Ils sont de l'avant de la résurrection.
Jean ne les voit pas ou plutôt il les ignore, ce qui le touche sur l'instant, c'est le tombeau vide.
Il ne cherche pas d'explications. Il ne se demande pas qui a pris le corps ? Et pourquoi, on a bien plié les linges ?
Non rien de tout cela, tout son corps est pris dans l'aventure de la résurrection. Il n'y a pas de raison. Rien ne peut expliquer la foi. Jean croit et c'est tout.

Pierre, il lui faudra d'avantage de temps pour qu'il croît avec tout son être et plus seulement avec sa tête. Il faudra que Jésus, le ressuscité, lui demande par trois fois : "m'aimes-tu ?" pour qu'il s'abandonne totalement à son Seigneur. Et ainsi comme nous l'avons écouté dans la première lecture, Pierre prend la parole et annonce : "Celui qu’ils ont supprimé en le suspendant au bois du supplice, Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Il lui a donné de se manifester, non pas à tout le peuple, mais à des témoins que Dieu avait choisis d’avance".
Pierre, le roc, ne parle plus des linges, il nous entraîne à suivre le Christ directement de la croix à la résurrection avec force et conviction.

La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d’angle :
c’est là l’œuvre du Seigneur,
la merveille devant nos yeux.
Amen !
Dominique Bourgoin, diacre.

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