La Parole de Dieu qui nous est
adressée aujourd’hui commence par le récit de la déprime du prophète
Elie : « maintenant, Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma
vie : je ne vaux pas mieux que mes pères. » C’est quoi la déprime
d’un prophète ? Il croit en Dieu, lui. D’accord il a des adversaires, et
une en particulier, la reine Jézabel, qui veut sa peau. Mais il a un rocher
auquel s’accrocher dans la tempête.
Il croit en
Dieu. Justement c’est peut-être là le problème. Dieu, le Père, personne ne l’a
jamais vu, comme dit Jésus. Bien sur Jésus est venu ; il est venu de Dieu
et il le connait Lui. Mais Jésus est mort. Oui mais il est ressuscité et il est
apparu à ses apôtres et à bien d’autre, en chair et en os. Oui, mais il nous a
été enlevé. Alors, au bout du compte, quelle relation nous reste avec Lui et
par lui avec son Père.
Nous aimons
Jésus. En tout cas nous le voulons. Mais pour ce qui de ce que je ressens pour
Lui, de ce que je vois ou entends de Lui, c’est pas joué. Combien de fois est
revenue la souffrance de constater que nous ne savons pas vraiment ce que veut
dire aimer le Seigneur. Où est donc un vrai sentiment à son égard ; une
véritable écoute de sa Parole vive ? J’ai beau dire et redire, avec le
psaume 21 : « o toi mon Dieu, toi qui demeures en la louange, ne
t’en va pas loin de mon cri. Ne t’en va pas des mots que je rugis le jour et
qui la nuit me laisse sans repos. Ne t’en va pas. Ne sois pas loin », …
c’est long de guérir. Il y tant de contrefaçons
de l’amour inscrites dans ma chair. Il y a bien quelques moments d’apaisement,
de fulgurance même. Mais quand donc s’installera à demeure en moi l’amour qui
ne passe pas, celui qui a sa source en Lui ?
Combien de
fois nous nous sommes agenouillés devant lui, pour le supplier de se manifester
plus distinctement, de nous montrer plus clairement quel est son œuvre en ce
moment, qu’est-ce qu’il demande au juste. Certes il y a bien un certain
consentement à faire ce que me demande l’Eglise, comme un fidèle serviteur.
Mais il faut bien interpréter ces demandes. Reviennent alors, inlassablement,
nos habitudes, nos propres manières de voir, nos stratégies préférées, et nos
points d’honneur, comme disait Thérèse d’Avila.
Bref, la
déprime d’Elie, je connais et je ne suis pas les seul. J’essaie de m’en
protéger, mais il y a des jours où, avec tout le monde autour de moi,
j’entends : mais où est-il votre Dieu ? il est parti en vacances.
La relation
au Christ, c’est bien une affaire de cœur, d’avoir des yeux pour le voir et des
oreilles pour l’entendre. C’est notre chair en somme qui est malade.
Saint Paul
écrit : « amertume, irritation, colère, éclats de voix,
insultes, méchanceté, tout cela doit être éliminé de votre vie ». D’accord
il ne faut pas attrister l’Esprit saint. Mais, bon Dieu, comment çà marche.
Elie a eu un ange, qui a lui a porté
une galette, en lui disant : « lève-toi et mange ! il est long
le chemin qui te reste. Et nous qu’avons-nous ?
C’est en cet
endroit de notre vie que vient la parole de Jésus : « moi, je suis le
pain de la vie ».
… et il faut
que je vous en dise quelque chose. Alors je me risque et que l’Esprit fasse son
travail.
En premier
ceci : Jésus est la Parole de Dieu. Mais, comme le dit Jean en toutes
lettres, la Parole de Dieu ne parle pas, elle ne fait pas de discours, elle
devient chair, elle agit, elle soigne, elle restaure des liens, elle accomplit
l’œuvre du Père : faire de nous le corps du Fils qui porte son image.
Ceci suffit
à tracer notre route : d’abord nous mangeons le pain et buvons le vin,
comme il nous a dit de le faire. Puis nous écoutons : lève-toi, il est
long le chemin qui te reste. Et sa présence vient, quand il veut, comme il
veut, dans ce qui nous arrive dans notre chair, en famille, au travail, en
vacances, et la nature de nos liens, heureux ou difficiles, quelques soient les
circonstances, amis, étrangers, chrétiens, juifs, musulmans ou autres,
brillants ou paumés, riches ou pauvres.
A nous
apprendre d’avoir des yeux pour voir et des oreilles pour entendre les détails
dans lesquels le Christ montre sa présence, sa miséricorde, la sienne. Un peu
comme lors de l’Exode : le jour c’est la nuée qui conduit le peuple ;
la nuée c’est-à-dire l’ombre portée de son intrusion dans nos relations, nos
principes, nos habitudes. Cette ombre n’annonce pas forcément un orage, mais
signale son passage. Et la nuit, c’est le feu qui conduit le peuple. Alors si
dans vos insomnies, vos rêves fous ou vos cauchemars, le feu surgit,
levez-vous, agenouillez vous, peut-être vous verrez le bras de Jésus sur les
épaules de Jean, comme s’est sculpté sur le portail nord de notre cathédrale.
Profitez-en.
Car il n’y a
pas que des déprimes dans nos vies, il y a parfois des fulgurances, de jour
comme de nuit, comme me disait l’une d’entre nous il y a quelques jours, des
surprises venue du ciel, la lumière d’en-haut. Si vous vous en méfiez ou en avez
peur, laissez-vous faire, une fois. C’est pas une affaire de sentiment de nous
vers Lui, c’est son amour pour nous qui fait le déplacement. C’est sa chair
qu’il donne pour la vie du monde.
Jean-Pierre Duplantier
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