La parole ou le silence / Mt 18 15-20 / Une homélie


Récemment un ami choqué par les propos et les actes complotistes et racistes de proches, croyants et pratiquants, m’a demandé si en tant que chrétien il devait leur parler ou se taire

la parole ou le silence, s exprimer ou se taire pour ne pas faire de vague ? surprise de constater que la liturgie du 23éme dimanche abordait justement la question de ce qu’on peut appeler « la correction fraternelle », à tort ou à raison.
Dès le début de la liturgie de la Parole surgit la figure du guetteur (veilleur)
Dieu s’adresse au prophète Ezéchiel (6e siècle avant JC) en ces termes :
« Fils d’homme je fais de toi un guetteur pour la maison d’Israël. Lorsque tu entendras une parole de ma bouche tu les avertiras de ma part »

Pendant une grande partie de l’exil du peuple hébreux à Babylone Ezechiel a soutenu de la part de Dieu l’espérance du peuple quand il doutait.
Le rapprochement avec l’Evangile de ce jour est éclairant : car nous voyons Jésus charger ses disciples d’une mission analogue à celle d’Ezekiel. Au nom de l’amour fraternel, il leur recommande de veiller les uns sur les autres, au point d’être capable de rappeler à l’ordre celui ou celle qui fait fausse route.
Cette figure du guetteur est piégée si on ne prends garde. Nous connaissons les guetteurs qui avertissent de l’arrivée de la police dans des trafics frauduleux. Plus familier celui qui guette à l’automne le passage des palombes. Mais il y a aussi et surtout le guetteur qui veille sur l’environnement, la forêt du haut de son pylône pour avertir et protéger en cas de danger.

Nous sommes aujourd’hui les disciples auxquels cette demande de Jésus est destiné. Cela peut nous inquiéter ou nous affoler devant une tâche complexe, dans ce monde ou une très ancienne devise est toujours vivante « Chacun pour soi et Dieu pour tous »
Si le guetteur sur le pylône voit la fumée et reste silencieux ou s’il s’endort il est coupable de « non assistance à personnes en danger » La vie spirituelle serait-elle exclue de cette culpabilité ?

La traduction liturgique ne nous aide pas .Je restitue le texte original de Matthieu. Il écrit « si ton frère vient à pécher », et pas « si ton frère a commis un péché », ce qui manifeste mieux que le péché ne peut se réduire à un acte unique. De même, « Montre-lui sa faute » n’est pas le texte de matthieu mais « fais-lui découvrir qu’il a péché »
Le péché est avant tout la résistance consciente voire volontaire au double commandement de l’amour : L amour de Dieu et du prochain.
Voilà le le contexte dans lequel Jésus nous invite a agir chacune et chacun ou ensemble !

Il propose trois attitudes possibles. Soit un dialogue fraternel, ou si nécessaire, une réflexion avec un petit groupe de baptisés pour introduire un critère de vérité. S’il n’y a pas de résultat le dire à la communauté de l’Eglise Il s’agit de la communauté des croyants souhaitée par Jésus et non d’une autorité ou d’une institution constituée. Original et radical du début à la fin une démarche fraternelle dont le but est que la relation de fraternité soit  « gagnée » c’est à dire maintenue, retrouvée renforcée et que le lien avec le corps du Christ ne soit pas rompu
Si tout a échoué « s’il refuse d’écouter l’Eglise considère le comme un publicain ou un païen »
Cela nous paraît comme une terrible exclusion. Cela pourrait être aussi la reconnaissance de la liberté de celui ou celle que l’on veux comme sœur ou frère, mais qui n’est pas volontaire ou capable pour le devenir ou le rester. Mais ce frère perdu continue à être attendu, désiré.
Jésus ne propose pas un simple rappel à l ordre. Car s’agit à chaque étape non pas de stigmatiser un acte mais de maintenir au nom Jésus le lien fraternel et la présence dans le corps du Christ.
A notre baptême nous sommes devenus prophète, guetteur de Dieu pour le service de l’Eglise et du monde. Nous saurons prendre cette place, dans l’humilité ; Mais il y a des conditions.

Jamais le guetteur n’agit en son nom propre mais au nom de Jésus. L’attitude du guetteur est d’être enraciné dans le Christ « là ou deux ou trois » c’est cette présence qui inspire nos paroles et non notre conception personnelle de la vie ou du monde.
Se souvenir aussi que nous sommes tous pécheurs. Sur ce plan nous somme tous égaux
« Lorsque je montre quelqu’un du du doigt, je tourne trois doigts contre moi » dit un proverbe arabe.

Être guetteur ce n’est donc ni dominer, ni épier, ni stigmatiser, ou accuser ni humilier, dénoncer, juger etc
Être guetteur c’est écouter, guider, discerner, accompagner, rassurer. C’est avant tout AIMER avec la grâce de Jésus et la force de l’Esprit Saint.

Seigneur, que la loi d’Amour soit notre règle en toute chose dans nos relations avec toi et entre nous.
Robert Zimmermann
diacre

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