Vous
vous souvenez probablement que pendant la semaine sainte, la porte de
cette église était décorée de rameaux, puis de fleurs (cf photo ci-dessus). Ceux
qui étaient là le dimanche des rameaux l’ont vue s’ouvrir
devant eux après la bénédiction sur la place.
Certains
se sont posé la question : pourquoi porter une attention
particulière à la porte ? Quel sens ça avait de la décorer ?
De la mettre ainsi à l’honneur….
L’évangile
d’aujourd’hui peut nous donner une piste pour répondre à ces
questions.
On
nous dit, c’est « le dimanche du bon pasteur », mais
bizarrement la liturgie coupe le texte et passe sous silence toute la
partie où Jésus se désigne comme le pasteur des brebis. Aujourd’hui,
il y a bien un berger dans le texte, mais Jésus ne dit pas que c’est
lui. Par contre le voilà qui affirme deux fois de suite : « Je
suis la porte » ! On
aurait dû appeler ce dimanche, le dimanche de la bonne porte.
L’affaire
est délicate et il n’y a pas que les pharisiens qui soient perdus.
Il
y a un espace qui s’appelle l’enclos des brebis, il y a des gens
qui pénètrent cet enclos, en escaladant, il y a une porte aussi, et
un portier qui ouvre au berger. Il
y a des brebis enfin qui sortent, qui entrent, qui ont surtout
l’oreille fine puisqu’elles marchent à la voix. Et
dans tout ça, Jésus ne se pose pas comme le berger (il le fera plus
tard) mais d’abord comme la porte.
Et
une porte étrange puisque c’est la porte des brebis… pas la
porte de l’enclos.
Nous
ne sommes pas des brebis. Jésus
ne nous prend pas pour des brebis. Il n’attend pas que nous
ressemblions à des brebis.
Imaginons
que ce qu’il nous décrive ce soit notre petit monde intérieur,
notre paysage intérieur. Il y aurait, en chacun de nous, un lieu
précieux, un lieu clos, bien protégé, dans lequel attendrait bien
sagement ce qui appartient au Seigneur.
La
part qu’il s’est choisie, la part qui le connaît depuis
toujours, qui a les oreilles pour entendre et reconnaître sa voix.
Depuis
notre naissance − probablement depuis avant notre naissance − il
y a en nous quelque-chose qui est sensible à la voix du Seigneur,
quelque chose de fragile, de doux et de docile qu’il aime
particulièrement… imaginons
que ce quelque chose en nous, il appelle ça : brebis.
Alors
à nous de chercher si par hasard on ne verrait pas qui sont ces
voleurs qui tentent de venir disperser ou faire périr les brebis ?
n’y aurait-il pas en chacun de nous des forces de mort qui
aimeraient bien voler au Seigneur ce qui lui appartient ? On
pourrait appeler ça orgueil, envie, tristesse…
Mais
revenons à la porte.
« Je
suis la porte des brebis »
Cette
part de lui en nous n’est pas destinée à rester enfermée. Il y a
une porte. Et c’est une porte qui s’ouvre dans les deux sens :
on entre et on sort ! Les
brebis elles suivent la voix du berger, mais elles sont libres aussi
d’aller et venir, d’entrer et de sortir. Ce
qui compte, c’est de passer la porte, et la porte, c’est Jésus
lui-même.
La
porte n’est jamais la destination finale, la porte est toujours un
passage entre deux espaces, elle est passage mais elle est aussi
limite et on sait bien qu’on ne peut jamais demeurer dans la
porte. Vous
le vivez à chaque messe en arrivant ici : ceux qui restent dans
la porte bloquent tout et empêchent tout mouvement !
Jésus
est ce qui, en chacun de nous permet le mouvement, permet que nos
vies intérieures ne soient pas closes, ne soient pas bloquées, que
l’on puisse entrer et sortir, que l’appel de sa voix puisse non
seulement être entendu mais qu’il puisse surtout se traduire en
mouvement.
Et
comme je parle d’appel, je voudrais finir sur la question de la
vocation… puisque l’Église a fait de ce dimanche du bon pasteur
le dimanche de prière pour les vocations.
Je
l’ai dit : il y a en nous une part fragile, douce et docile
dont les oreilles sont capables depuis toujours d’entendre et de
reconnaître la voix du Seigneur.
La
vocation, ce n’est rien d’autre que de lâcher les brebis, que de
les laisser aller, que de les laisser répondre à cette voix. Ce
n’est rien de spectaculaire, rien de mystique, ceux qui répondent
ne sont pas des héros, ils ne sacrifient rien.
Il
faut absolument arrêter de croire et de répéter que les prêtres
donnent leur vie ! c’est faux ! Les prêtres, les
diacres et les évêques ne donnent pas leur vie ! Il
se la laisse ravir !! ils sont ravis de se la laisser ravir ! et
ils reçoivent bien plus qu’ils ne croient perdre ! Seul
Jésus donne sa vie ! (c’est la suite du texte)
Un
ministre ordonné ou un séminariste qui vous dirait qu’il donne
sa vie est bien malheureux… parce que le Seigneur ne la lui demande
pas. Le
Seigneur lui demande seulement de se laisser aimer par lui…
La
voix du berger sonne aux oreilles de chacune de nos brebis
intérieures.
Si
elle sort de l’enclos, elle répond à sa vocation. Si
elle passe par la porte, elle est sauvée. Ne
prions pas pour que des jeunes hommes entendent des voix qui leur
demandent d’entrer au séminaire. Prions
pour que chacun, homme ou femme, jeune ou vieux, reste attentif à la
voix. A la voix de celui qui le connaît, de celui qui a donné sa
vie par amour pour lui, de celui qui saura vers quel pâturage il
veut le conduire. Et ça passera peut-être par un séminaire...
Il
était bon de décorer la porte. Pour qu’à chaque fois que nous
passons dessous, pour entrer mais aussi pour sortir, nous nous
souvenions d’ouvrir nos oreilles à la voix, la voix qui dit :
« Moi,
je suis venu pour qu’on ait la vie, et qu’on l’ait
surabondante »
╬ Amen
alléluia !
Sylvain
diacre
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