Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens?"/Mc 7 1-23 / Une homélie

"Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ?" Les pharisiens et les scribes voient dans l'attitude des disciples de Jésus comme une rupture avec la tradition. Ils semblent reprocher comme un comportement de révolte de la part des disciples. Essayons de comprendre l'attitude des pharisiens et des scribes puis celle des disciples et enfin celle de Jésus.

L'attitude des pharisiens et des scribes.

Les premiers, on le sait, observent strictement la loi. Ils l'observent à la lettre. Les seconds, les scribes sont quant à eux les spécialistes de l'écriture. Les uns comme les autres ont entendus parler des miracles de Jésus. Le passage que nous venons de lire se situe juste après la multiplication des pains sur la montagne. Il paraîtrait même que Jésus a marché sur l'eau pour rejoindre ses apôtres en perdition sur le lac de Tibériade. Mais de telles choses, ça ne rentre pas dans ce que les pharisiens et les scribes connaissent. En eux, s'insinuent le soupçon. C'est quand même bizarre que des gens suivent cet homme doivent-ils se dire. Ce Jésus, il parle en maître et ils sont nombreux à le suivre. De quel droit ? Alors, ils observent, ils espionnent et dès qu'ils voient quelque chose qui cloche par rapport à leur propre référence des valeurs, ils accusent : "Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens ?" En fait, ils s'inquiètent de ce que le comportement des disciples peut avoir de révolutionnaire et venir bousculer une société bien ordonnée, qui ronronne.

Ce comportement-là, c'est un comportement qu'on connait bien, nous, les humains. On le connait très bien, nous, les humains du XXIème siècle. Car pour observer, ça observe, ça s'observe entre les générations, ça s'observe entre groupes sociaux différents. Combien de fois jugeons-nous par rapport à notre propre référentiel de valeurs ? Combien de fois arrêtons-nous un jugement sur quelqu'un sans même faire l'effort de comprendre. Cet homme mal habillé qui tend la main à la sortie de l'église, ne peut-il pas travailler ? Et l'argent qu'on lui donne, ne va-t'il pas le dépenser en alcool ? Se lave-t'il bien les mains avant de manger ? Ne profite-t'il pas d'un système social trop permissif ?

L'attitude des disciples.

De l'attitude des disciples on sait peu de chose. Ils mangent avec des mains impures. L'évangéliste Marc ajoute "c'est-à-dire non lavées". Et puis il énumère une liste de prescriptions qui concourent à la pureté. Probablement qu'une ou plusieurs prescriptions ont été ignorées par les disciples.  Quand il eut quitté la foule pour rentrer à la maison, ses disciples l’interrogeaient sur cette parabole. En fait les disciples parlent mais le passage a été retiré de la lecture d'aujourd'hui, et je vais me permettre de vous le lire :

"Quand il eut quitté la foule pour rentrer à la maison, ses disciples l’interrogeaient sur cette parabole. Alors il leur dit : « Êtes-vous donc sans intelligence, vous aussi ? Ne comprenez-vous pas que tout ce qui entre dans l’homme, en venant du dehors, ne peut pas le rendre impur, parce que cela n’entre pas dans son cœur, mais dans son ventre, pour être éliminé ? » C’est ainsi que Jésus déclarait purs tous les aliments. Il leur dit encore : « Ce qui sort de l’homme, c’est cela qui le rend impur."

En fait, comme les pharisiens et les scribes, les disciples sont un peu prisonniers de la tradition. Certes, ils n'ont certainement pas une pratique aussi rigoureuse mais les histoires de ce qui rentre et qui sort ça les dépasse. En revanche, en aucun cas les disciples ne sont dans un élan révolutionnaire. Ils sont juifs, ils suivent la loi juive. A tel point qu'ils ne comprennent pas ce qui est nouveau dans ce que dit Jésus.

Et nous même, disciples de Jésus, nous aimerions bien être les représentants d'une rupture totale avec les comportements archaïques des pharisiens, des scribes et des disciples qui ne comprennent décidément rien à rien. Et pourtant il n'y a pas de révolution juste un désir de conversion exprimée par Jésus. Nous allons mieux comprendre ce projet dans l'attitude de Jésus.

Enfin, l'attitude de Jésus.

En premier lieu, Jésus ne remet en cause ni la loi ni l'écriture. D'ailleurs pour répondre aux remarques des pharisiens et des scribes, Jésus cite Isaïe le grand prophète : "Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi."

En second lieu, Jésus montre des connaissances anatomiques certaines et aussi bien terre-à-terre. Il rappelle la différence évidente entre le système digestif et le système vasculaire. Il est si trivial qu'il en est à comparer nos aliments avec nos déjections.

Jésus n'est pas un révolutionnaire. Il est juif. Il appelle juste ses interlocuteurs, qu'ils soient pharisiens, scribes ou disciples à se convertir, à ce que le comportement de chacun soit tourné vers le Père qui vient du ciel.

Il nous invite à nous dessaisir de nos habitudes, de nos rites, pour retrouver un étonnement dans tout ce qui nous est donnée de vivre dans notre relation à Dieu. Il nous appelle à regarder la part de Dieu qui habite en l'homme qui tend la main à la sortie de l'église.




Celui qui se conduit parfaitement,
qui agit avec justice
et dit la vérité selon son cœur.
Il met un frein à sa langue.




Amen !

Dominique Bourgoin, diacre.

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