Baptême de Jésus / Une homélie

"Le peuple venu auprès de Jean le Baptiste était en attente," le peuple attendait qui ? Le peuple attendait quoi ? La question qu'il se pose en lui-même nous éclaire. "Si Jean n’était pas le Christ." Mais pourquoi attendent-ils le Christ ? Qu'attendent-ils du Christ ?
En ce temps-là, le peuple vit dans la crise économique, les pouvoirs s'empilent et prélèvent chacun des impôts diminuant ainsi le pouvoir d'achat et pénalisant la consommation. En ce temps-là, le peuple vit dans l'insécurité, les juifs sont occupés par les romains et les révoltes sporadiques sont matées violemment.
Alors le peuple se rassemble autour de Jean le Baptiste qui pourtant ne propose ni solutions économiques, ni programmes politiques. Jean le Baptiste appelle à une conversion. Il demande simplement à chacun de se reconnaître pécheur et de se fier à la miséricorde de Dieu.
Chacun est appelé à se laisser regarder par Dieu et pour marquer cette conversion à être plongé dans l'eau boueuse du Jourdain.
Jean le Baptiste, déjà s'efface devant celui qui vient, il perçoit lui-même sa petitesse, lui le précurseur, il annonce que le baptême de Jésus sera plus puissant que le sien : "Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu."
Et de fait, nous les baptisés avons été plongés dans la mort et la résurrection de Celui qui vient sauver l'humanité embourbée dans ce qu'elle crée.
En 2016, le peuple vit dans la crise économique, le chômage est endémique, il se propage et s'auto-alimente. Contrairement au temps de Jésus, la consommation augmente dans des proportions inimaginables bien au-delà de ce qui peut être acquis et produit. Elle augmente au détriment de la terre qui est créée pour nous nourrir. A la crise économique s'ajoute la crise écologique. En 2016, le peuple vit dans un environnement qui se détériore.
En 2016, le peuple vit dans l'insécurité, je ne vais pas revenir longuement sur le séisme qui nous a secoués le 13 novembre Mais depuis cette nuit de l'horreur, il ne se passe pas une semaine sans ressentir les répliques de ce tremblement. Cette semaine encore, un fanatique s'est précipité à l'assaut d'un commissariat de police à Paris. Est-ce un attentat ? On ne le sait pas mais cela est vécu comme tel.
Autant dire que l'époque n'est pas réjouissante.
Alors presque comme au temps de Jésus, nous nous rassemblons, ici autour de cet autel, invités par celui qui vient nous sauver.
Mais contrairement à ceux qui venaient auprès de Jean le Baptiste, nous nous avons été baptisés dans l'Esprit saint et le feu. Nous sommes témoins pour nous de la rencontre avec le Père qui s'adresse à nous mystérieusement et nous dit chaque jour que nous vivons notre baptême : "Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie." Le baptême en Jésus Christ fait de nous des frères en Jésus. Cette phrase : "Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie." Elle s'adresse à nous. Alors allons-nous garder cette joie pour nous ? Allons-nous la garder bien cachée en nous ? Allons-nous la contempler en nous confortablement installés dans la certitude d'être sauvés ?
Non, là n'est pas notre rôle de baptisés, là n'est pas notre devoir, là n'est pas notre responsabilité. Le baptême nous fait prêtre, prophète et roi. Les prophètes que nous sommes, sont chargés de porter l'Evangile au monde. N'oublions pas qu'Evangile signifie Bonne Nouvelle.
Alors portons cette Bonne Nouvelle, et portons-la dans la Joie, dans cette joie que le Père met et puise en nous.
Nous ne sommes pas chargés de convertir le monde, nous sommes seulement chargés d'annoncer la Bonne Nouvelle. Convertir, c'est le travail du Père, laissons-lui la tâche la plus difficile et surtout ne prenons pas sa place.
« Ne soyez jamais des hommes et des femmes tristes », exhorte le pape François, car « un chrétien ne peut jamais l’être ». En effet, explique-t-il, la joie du chrétien « n’est pas une joie qui naît du fait de posséder de nombreuses choses, mais elle naît du fait d’avoir rencontré une Personne : Jésus, qui est parmi nous ».
Et la première vraie rencontre du chrétien avec Jésus, c'est lors de son baptême. Cette joie naît de son baptême.
Alors pour 2016, puisque les vœux peuvent s'adresser jusqu'au 31 janvier, je nous souhaite de la joie.
Cette joie qui naît de la rencontre avec le Seigneur.
Cette joie qui est véritablement communicative car elle désigne le chemin vers l'Amour.
Cette joie qui n'est pas vindicative car elle mène vers la paix.
Cette joie qui est féconde car elle conduit vers la vie.

Tous, ils comptent sur toi
pour recevoir leur nourriture au temps voulu.
Tu donnes : eux, ils ramassent ;
tu ouvres la main : ils sont comblés.

Amen !
Dominique Bourgoin, diacre