Nous
voici entrés dans la quatrième semaine de l’avent la plus courte
qui se puisse imaginer, puisqu’elle ne durera que quelques heures.
Ce
soir, tout à l’heure, nous fêterons Noël. Ce
matin Marie reçoit l’annonce, ce soir, elle enfantera. Neuf
mois d’attente en neuf heures au cadran de nos montres.
Cette
quatrième bougie que nous venons d’allumer n’aura brillé qu’un
instant. Il
faudra laisser la place à une lumière plus grande, la lumière
véritable qui vient dans le monde, l’enfant couché dans la
mangeoire.
La
lumière vient. Celle
qui éclaire tout homme, celle qui traverse les ténèbres de nos
vies. Mais
pour que cette lumière se lève ce soir, il va falloir de l’ombre. Cette
lumière ne surgira que parce que quelqu’un va consentir à être
mis à l’ombre. Ce
quelqu’un, c’est Marie.
Marie,
au jour de l’annonce, n’est pas la Vierge de lumière de
nos cantiques. Marie
n’est pas la Vierge glorieuse, entourée de rayons, d’éclats et
d’angelots. Le
programme que lui propose l’ange, ce n’est pas d’habiter la
lumière, c’est de se tenir dans l’ombre :
«
L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te
prendra sous son ombre » Le
texte dit : « te couvrira d’ombre »
Marie
comme figure de l’ombre.
L’ange
ne lui propose pas une place d’honneur. Il
ne lui propose pas les feux de la rampe. Il
ne lui promet pas la gloire et le piédestal des autels dorés. Il
lui promet l’ombre. L’ombre
de la puissance du très-haut.
Et
Marie consent
Marie
se fait l’esclave du Seigneur, elle
prend sur elle l’ombre du très-haut
Et
en entrant dans l’ombre, la lumière germe en son sein
Parce qu’elle est une figure de l’ombre, la lumière peut se
blottir en elle.
Parce qu’elle accepte d’habiter le pays de l’ombre, la lumière,
ce soir, va se lever sur le peuple qui marche dans les ténèbres.
Parce qu’elle disparaît dans l’ombre du très-haut, ce soir, une
lumière va resplendir sur ceux qui habitent le pays de l’ombre.
L’ange
ne promet pas à Marie de partager la lumière du fils. Elle
sera de l’ombre pour toujours pour qu’il soit lumière.
Elle
ne sera pas de l’ombre parce que c’est une femme soumise qui
s’efface devant la splendeur de l’homme qui vient
Elle
ne sera pas de l’ombre parce que c’est une mère modèle qui se
sacrifie pour la carrière de son fils brillant
Elle
ne sera pas de l’ombre parce que nous sommes complices d’une
culture où la femme compterait pour rien et où les hommes seraient
des héros
Contresens !
Absurdité !
Elle
consent à l’ombre-sur-elle, pour nous rejoindre nous…
nous qui sommes de l’ombre, nous qui marchons dans les ténèbres,
nous qui sommes les habitants du pays de l’ombre. Elle
consent à être ombre pour nous rejoindre dans notre ombre
Pour
rendre possible en nous la venue de la lumière
Pour
que la lumière prenne chair en nous comme elle l’a fait en
elle
Pour
que le Fils qui nous sauve vienne se blottir dans nos
entrailles comme il l’a fait dans les siennes.
Bienheureuse
figure de l’ombre, sombre gloire du très-haut qui choisit le cœur
de la nuit pour se manifester. Tout
à l’heure, c’est dans l’ombre de la nuit que nous chanterons
la Gloire de
Dieu que nous avons tue pendant quatre semaines. Tout
à l’heure, un autre ange se présentera devant des bergers et la
gloire du Seigneur les enveloppera... de sa lumière.
Minuscule
quatrième semaine de l’avent. Concentré
de temps et d’attente, quelques
heures pour contempler Marie, glorieuse figure de l’ombre.
Les
mots du psaume sont peut-être les siens :
«
(Seigneur)
Garde-moi comme la prunelle de l’œil,
à
l'ombre de tes ailes, cache-moi » (ps 16)
╬ Amen
Sylvain
diacre
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