Dans le Christ, avec les sentiments du Christ / Mt 21 28-32 / Une homélie

Il y quelques années, un jeune homme qui souhaitait devenir chrétien, me disait après quelques rencontres au cours desquelles il se familiarisait avec la Parole de Dieu :

« Dieu m’étonne, je ne le comprends pas bien »

Nous avons entendu dans la première lecture que les contemporains du prophète Ezéchiel trouvaient la conduite de Dieu « étrange ». Ils découvraient sa justice et voilà Dieu en position d’accusé obligé de se justifier « Je ne désire pas la mort du méchant » .

Dimanche dernier nous avons entendu un autre prophète, Isaïe

« Vos pensées ne sont pas mes pensées.

« Vos voies ne sont pas mes voies, car autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées »

Il est bon d’entendre que, si Dieu en Jésus Christ a adopté tout humain, ce n’est pas pour valider nos pensées et nos actions, mais bien pour y planter sa trace et nous conduire sur ses voies.

L Évangile que nous avons entendu aujourd’hui peut aussi nous laisser perplexe. La parabole reprend le thème de la vigne. Sylvain nous l’a rappelé, dimanche dernier, la vigne c’est le monde et nous sommes les ouvriers appelés à la vigne. Nous pouvons nous reconnaître dans l’attitude des deux fils. Ne sommes-nous pas tantôt l’un tantôt l’autre.

Vous avez remarqué aucun des deux ne fait ce qu’il dit.

Là où les mots s’opposent à la volonté du Père, l’acte s’y accorde ( 1er fils)

Là où les mots s’accordent à la volonté du Père , l’acte s’y oppose. (2e fils)

Jésus ne fait donc pas l’éloge du « faire ce qu’on dit ».

Jésus illustre la parabole dans la suite de son récit.

Les chefs des prêtres et les anciens - ceux qui sont les mieux informés au monde en ce qui concerne le loi de Moïse - seraient ceux qui disent et ne font pas. Tandis que ceux qui sont considérés comme des pécheurs, les publicains et les prostituées, sont prêts a entendre et à faire la volonté du Père. Ce qui est frappant c’est la référence à Jean Baptiste.

« Vous n’avez pas cru à sa parole » dit-ils aux prêtres et aux anciens. Ceux-ci, enfermés dans la loi, n’ont pas compris que Jean Baptiste ouvrait un chemin nouveau, celui du Verbe fait chair, comme la parole définitive de Dieu.

Mais malgré son discours tranchant : « les publicains et les prostituées vous précéderont dans le royaume de Dieu » Jésus ne les condamne pas, il les appelle à ouvrir leurs yeux et leur cœur à cette nouveauté radicale.

Car en réalité Jésus ne semble pas s’intéresser pas aux étiquettes qui peuvent être trompeuses, il ne stigmatise personne, il ne fait pas d’arrêt sur image. Ce qui compte aux yeux de Dieu c’est l’histoire de notre liberté Malgré nos résistances, on peut toujours se convertir et reprendre le bon chemin et répondre à l’appel pressant et si souvent répété de faire la volonté du Père.

N’est-ce pas ce que nous demandons sans cesse, plusieurs fois par jour pour certains et au moins une fois par semaine à la messe quand nos disons la prière de Jésus « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.»

Avons-nous réalisé combien cette demande un peu machinale nous engage.

« Sur la terre comme au ciel »

Pouvons-nous douter un instant que la volonté du Père ne soit pas faite au ciel. Par le petit mot comme nous demandons la même même chose pour la terre.

Les termes de Jésus : « Que soit faite ta volonté comme au ciel, ainsi( ainsi=de la même manière) sur la terre.

Nous ne demandons pas à Dieu de se « débrouiller » pour que sa volonté soit faite sur terre, mais de nous aider à y travailler. Je souligne il ne s’agit pas pour nous de dire la volonté de Dieu mais de la faire. Faire la volonté du Père ce n’est pas nous soumettre de façon servile au pouvoir d’un maître, mais c’est accepter, à son appel, de collaborer à son oeuvre pour le salut des hommes.. Cette responsabilité peut nous faire trembler.

Elle nous incombe en raison de notre baptême par lequel nous sommes dans le Christ. C’est ce que nous rappelle Paul, avec insistance, dans la lettre aux Philippiens. J’aime la manière dont il nous redit que nous sommes dans le Christ. Et comment il nous appelle à vivre, dans l’amour fraternel, et dans l’unité parce que nous sommes dans le Christ par notre baptême. Cela va loin.


« Ayez assez d humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes »

Curieuse phrase. S’agit-il de nous dévaloriser ? Le but n’est pas de se regarder soi-même pour s’humilier. Le but est au contraire de regarder l’autre avec les sentiments du Christ, sans jugement, avec un à priori positif, avec l’humble respect des qualités de chacun et de ses possibilités.

Il s agit de vivre et d’aimer comme on fait quand on est dans le Christ.


L Eglise a voulu aujourd’hui que notre prière et notre réflexion porte sur la situation des migrants et des réfugiés .Voilà un sujet qui souvent nous divise, qui attise nos peurs et nourrit nos fantasmes. Sur cette question complexe c’est en « étant dans le Christ » que nous devons agir, sans naïveté, sans poser des étiquettes, sans arrêt sur image, sans stigmatiser et sans amalgame hâtif.

C’est ce que Père attend de nous qui sommes dans le Christ.

Au soir de son baptême j’ai demandé au catéchumène, dont je vous ai parlé au début, si Dieu l’étonnait encore. Il ma répondu « Oui il m’étonne encore plus car je sais qu’il m’aime et surtout qu’il me pardonne. Et il a ajouté « Je sais maintenant que je peux compter sur lui »

Au cours de cette Eucharistie le Christ se fait serviteur. Nous sommes fortifiés et nourris par sa Parole et par par son Corps et son Sang, sa Vie , sa mort et sa résurrection. Nous avons besoin de lui, nous pouvons compter sur lui.

« Seigneur pour l’honneur de ton nom, pour la joie de participer à ton œuvre, traite-nous selon la richesse de ta Miséricorde »

Amen

Robert Zimmermann
diacre

 

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