Voici une belle affiche pour ce 7e dimanche
ordinaire, le dernier avant l’entrée en Carême de cette année.
Elle contient tout à la fois notre identité
chrétienne, indissociable de notre identité sociale ; elle nous révèle à
nous-mêmes et elle rappelle que nous sommes, dans le monde, appelés à être
missionnaires de la sainteté divine.
1. Appelés à la
sainteté
Qu’est-ce que la sainteté ?
Sans nous embarrasser d’envolées intellectuelles et de
démonstrations théologiques, retenons simplement la conception paulinienne, qui
me semble très universelle comme le terme lui-même.
Alors que chez les Hébreux l’on assimilait la sainteté
strictement à Dieu et aux lieux de sa demeure (Jérusalem et le Temple), ou
bien, chez les Grecs, à des lieux redoutés et objets à l’égard desquels on éprouve
une crainte respectueuse, Paul, lui, applique le mot à des vivants :
« Paul, apôtre du Christ Jésus,
par la volonté de Dieu, aux saints et fidèles dans le Christ
Jésus qui sont à Ephèse » (Ep 1, 1).
« Vous donc, les élus de Dieu,
ses saints et ses bien-aimés, revêtez des sentiments de tendre compassion, de
bienveillance, d'humilité, de douceur, de patience » (Col 3, 12).
On peut multiplier les exemples.
La conception de Paul est en réalité l’usage du
Nouveau Testament qui applique la sainteté à des vivants, des hommes et des
femmes de tous les jours. Et cet usage témoigne d'une étonnante évolution,
marquée par une compréhension très profonde du message du Christ : « Soyez
miséricordieux comme votre Père est miséricordieux ».
Alors que Luc opte pour le terme
"miséricorde", Mathieu préfère l’adjectif "parfait" pour
désigner la sainteté : « Vous donc, vous serez parfaits comme
votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 48). Cette invitation peut
nous paraître incroyable, prétentieuse et nous amener à nous demander comment
le Seigneur peut-il nous assigner un objectif aussi haut. Assurément, le Christ
ne nous incite pas à singer le Créateur dans une ridicule imitation. Il nous
invite au contraire à nous vider de notre vanité, à laisser s'évaporer nos
prétentions et nos ambitions, même les plus légitimes, pour laisser nos vies
être transfigurées par le Père en les habitant par sa présence. Comme vous
pouvez le constater, « la perfection divine n'est pas une abstraction.
Elle est une réalité concrète qui se révèle dans notre monde ». Car le
Père habite le monde.
Ne perdons pas de vue que depuis dimanche dernier,
nous méditons le sermon de Jésus sur la montagne : ce discours qui, par la
densité de son contenu, mais aussi par sa place et sa longueur (il couvre 3
chapitres) est bien le premier des 5 que Mathieu attribue à Jésus. La station
de Jésus sur la montagne est l'expression symbolique de l'habitation divine
dans notre monde. « Dieu fait homme montre aux hommes que Dieu est
présent en leurs vies. Dieu se manifeste dans sa Création par la
créature faite à son image ». Dès lors, frères et sœurs puisque nous
avons été appelés à être configurés au Père saint, n’oublions pas nous sommes
aujourd’hui les missionnaires de la sainteté dans le monde.
2. Missionnaires
de la sainteté dans le monde
Comment, concrètement, annoncer
aujourd’hui la bonne nouvelle de la sainteté :
-
Dans un monde où la religion est continuellement
suspectée, où les avancées de la science et de la technologiques défient les
fondements de la foi et rivalisent avec le Créateur dans leurs
inventions ?
-
Dans un monde à où la violence et la contrainte sont
devenues le langage des puissants, des forts, si bien que ne pas riposter c’est
manquer de caractère.
-
Dans un monde où les relations entre les hommes sont
empreintes de haine, ou tout au moins de méfiance ?
Moïse avait fondé un droit qui représentait déjà, en
son temps, une considérable humanisation des rapports sociaux ; c’est la
loi du talion, qui venait limiter la vengeance et mesurer la juste compensation
d’une offense : un œil (et non pas 2) pour un œil ; une dent (et
non pas une mâchoire) pour une dent abîmée.
Mais Jésus énonce aujourd’hui une solution
radicale : « Ne pas riposter au méchant ». C’est une voie
révolutionnaire pour ceux qui ont choisi la sainteté comme style de vie et qui
savent désormais que le coup "justement" rendu n’est pas une fin,
mais le début d’une réaction en chaîne de la violence. Tel est l’exigence du
Royaume qui appelle à vaincre le mal par l’amour et suppose une dilatation du
cœur de l’homme désormais ouvert à tous. Même aux méchant. Car sur eux aussi,
le Seigneur fait lever son soleil ; et même aux injustes, il accorde les
bienfaits de la pluie.
Le pape François avait donc raison de dire que
« la sainteté c'est une qualité du regard qui fait que dans l'autre je ne
vois pas d'abord le mal mais la manière dont il est aimé par Dieu ».
Et si Mathieu préfère parler de
"perfection", c’est que pour lui la miséricorde étendue jusqu’à
l’amour de l’ennemi constitue cette perfection attendue des fils.
Être missionnaires de la sainteté dans le monde
aujourd’hui sera pour nous, frères et sœur bien-aimés, d’ordonner notre vie à
l'évangile de la miséricorde pour nous mettre au service du monde et de la
société. Personnellement et collectivement. Pénétrés de la sagesse rayonnante
de Dieu, récusons avec courage toutes les fausses sagesses qui ne contribuent
qu’à ériger des murs entre les hommes et à inoculer le venin de la haine sous
toutes ses formes : raciale, religieuse, sociale,).
Que Dieu nous prenne en grâce et qu’il nous bénisse.
Amen.
Père Calixte Koulate
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