Quand je serai élevé de terre /Jn 3 14-21 /Une homélie


« Dieu a tellement aimé le monde qu’il lui a donné son fils unique :
ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais obtiendra la vie éternelle »
Voilà la joyeuse nouvelle qui résonne aujourd’hui dans le monde en ce 4e dimanche de carême.
C'est ce que confirme Paul (2e lecture) « Nous étions mort à cause de nos fautes. Dieu nous a fait revivre avec le Christ. C’est bien par grâce qu'il nous a sauvé »
Voilà encore une raison de nous réjouir au milieu de nos angoisses.
Nous sommes sauvés !
Cette parole est tellement saisissante que nous pourrions être tenté par une jubilation passive, puisque par la grâce de Dieu notre salut est assuré. Penser cela serait oublier une partie de la Parole de Jésus : « Tout homme qui croit dans le fils de l’homme ne sera pas jugé mais obtiendra la vie éternelle .»
Encore une raison d’être dans la joie. Il y a moyen d’échapper au jugement.
Y aurait-il comme une opposition entre le jugement et à la vie éternelle ?
A y regarder de près, tout simplement, il n’y a pas de jugement
D’abord parce que Jésus n’est pas venu pour juger mais pour sauver. Celui qui croit, échappe au jugement et celui qui ne croit pas est déjà jugé. Etrange !
Et pourtant Jésus donne un contenu au jugement
« Quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres, car leurs œuvres étaient mauvaises » Ce jugement est donc comme un constat de notre réalité humaine. Le jugement n’est plus ici synonyme d’une quelconque sentence divine mais une révélation du secret du cœur humain. L’humain tiré vers les ténèbres et capable de choisir et d’aspirer à la lumière. Le jugement met au jour le clivage qui est la condition de notre humanité. Le combat de tout humain. Jeudi dernier, ici même ; Mgr James, notre archevêque nous a parlé d’un combat spirituel. Et c’est au milieu de cet inévitable combat que Jésus vient nous sauver. Ce combat se réalise dans note chair, pas seulement dans notre esprit.

Dans l’évangile Jésus associe son élévation sur la croix avec l’épisode du serpent d’airain que Moise élève pour détourner le regard des hébreux dans le désert des morsures mortelles des serpents. Le serpent cet animal qui dans l’imaginaire de bien des peuples représente la mort autant que la renaissance, autant le poison que la guérison.
La croix à la fois comme représentation du mal mortel, mais aussi comme lieu, où le Fils, s’offre. Non pas un remède, mais la vie elle-même

(Jn, 12,32) une parole de Jésus avant sa passion « Quand je serai élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. » toute humanité

Dans quelques instants le prêtre dira : « élevons nos cœurs » et nous répondrons « nous le tournons vers le Seigneur » juste avant que par la liturgie eucharistique nous entrions sacramentellement dans le Mystère de la croix
Nous disons, et c’est notre foi, que le Christ descend sur l’autel pendant l’eucharistie, ou qu’il descend en nous au moment de la communion. Nous oublions peut être que c’est alors que le Seigneur s’abaisse, nous sommes élevés, que nous allons avec lui pour faire un seul corps..( lorsque nous avons communié, nous sommes ensemble élevés chez lui). Mais si nous nous tournons vers le Seigneur ce n’est pas pour monter sur un nuage et être extrait de nos vies terrestres dès aujourd’hui, mais bien pour continuer à y vivre remplis de son esprit, de sa force..

Heureux ceux qui voient dans la croix du Christ élevé de terre la vive lumière de l’amour dont nous sommes aimés et tout à la fois l’ombre de leur propre violence pour avoir le goût d’en guérir.
La lumière se trouve en marchant. L’amour demande à être vécu. Ce n’est pas une idée ou une idéologie, cela devient un choix.
Elevés avec le Christ , un écueil nous guette cependant
Une forme d’accusation du monde, qui porte en germe le pessimisme et la violence. Au risque de ne plus percevoir les signes de vie évangélique qui germent aujourd’hui au milieu de toutes nos ténèbres.
Être élevés avec le Christ, cela ne nous exonère pas d’avoir à regarder en face le poison mortel qui nous menace. Saurons-nous reconnaître, les morsures qui nous entraînent à la mort ? Saurons-nous discerner les postures, qui nous emprisonnent dans notre condition mortelle ?
Saurons-nous éviter aussi un autre écueil écueil qui serait de prétendre nous sauver de tout cela par nous-même ?

Il s’agit bien de porter un regard de foi sur celui qui est élevé et de nous laisser attirer dans la lumière, là où le Christ nous associe à son combat contre la mort. L’Eglise nous invite aujourd’hui à être dans la joie les témoins du salut.
Au milieu de ce monde que Dieu aime, acceptons, avec audace et aussi humilité, d’être les porteurs de cette joyeuse vérité du salut, à temps et à contretemps. Il est de notre responsabilité que l’amour élevé sur la croix soit visible, de loin et pour tous. Nous ne serons pas témoin uniquement par la splendeur de nos liturgies ou la profondeur de nos prières qui nous tournent et nous élèvent vers le Christ, mais aussi par nôtre engagement de disciple auprès de tous les hommes. Si nous faisons la vérité en nous et entre nous, notre commune fraternité, illuminée et fécondée par celle du Christ, peut-devenir pour nos contemporains lumière et joie..
Tournons-nous avec confiance vers le Seigneur et demandons-lui cette grâce.

Amen
Robert Zimmermann
diacre

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