L’histoire sainte nous a conduit au Sinaï, au désert et
aujourd’hui sur la montagne, où Jésus monte avec Pierre Jacques
et Jean. Le Thabor c’est la montagne de la splendeur, de
l’éblouissement, de la métamorphose.
Les hommes du Sinaï et de l’Horeb entourent Jésus.
Moïse, qui dans le fracas de l’orage est entré dans la nuée pour
recevoir la loi et sceller l’alliance, et Elie dont la rencontre
avec le Seigneur fut un subtil silence, le bruit d’une brise
légère, un souffle fragile. Et les trois apôtres sont là ils ne
savent pas pourquoi. Ils avaient tout quitté pour suivre Jésus.
Au long des mois passés avec lui sur les routes de Palestine ils
l’ont vu vivre, avec eux, comme eux, comme un homme. Parfois ils
ont pris conscience du mystère de leur maître, au prix de
conversions successives parfois éphémères ou de quelques
reniements, mais comme Pierre l’a exprimé peu avant ils ont
reconnu qu’il était le Christ, le messie.
Mais voilà que Jésus les bouscule, les déboussole en leur
annonçant sa passion et sa mort.
Là sur montagne la vision qui leur est offerte est troublante.
« Le visage de Jésus devient brillant comme le soleil et ses
vêtements blancs comme la lumière. »
La face de Jésus, ses vêtements, son corps lui- même devient
lumière, il est la lumière.
Jésus éclaire Moise, la loi et Elie, les prophètes.
Nous pensions que ces deux personnages étaient présents pour
attester que Jésus est bien celui que les Écritures annoncent. Nous
sommes obligés aujourd’hui de faire une lecture différente. Celui
que les Écritures annonçaient, illumine de sa propre clarté la loi
et les prophètes qui l’annonçaient.
C’est clair, tout est en ordre, que demander de plus, restons-en là
« Il est heureux que nous soyons ici je vais dresser trois tentes
une pour toi, une pour Moïse une pour Elie »
Nous le comprenons bien Pierre, nous qui sommes si souvent tentés
d’en rester là.
Nous sommes si bien ici ensemble à contempler et louer notre Dieu,
si loin des bruits de la ville et du monde. En ces temps que nous
vivons ou nous sommes nous-même déboussolés, perturbés,
angoissé : épidémie certes, mais aussi violence, tensions
sociales, incertitudes et où même certains événements récurrents
au sein de l’Eglise nous déboussolent.
Oui nous sommes si bien ici. Restons-en là
Mais la bonne nouvelle n’en reste pas là.
« Il parlait encore lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit
de son ombre »
La nuée bien que lumineuse les plonge dans l’ombre, elle les
aveugle et les prive de vision.
Ils sont tous les trois face contre terre et ils sont saisis d’une
grande frayeur (comme les bergers la nuit de la nativité.) Dans la
nuée qui vient interrompre leur installation plus rien à voir mais
une parole à entendre.
« Celui-ci est mon fils bien aimé, en qui je trouve ma
joie, écoutez-le !
Répétition
de la Parole du Père au moment du baptême de Jésus par Jean
le Baptiste. Mais cette fois-ci cette parole semble s’adresser aux
trois apôtres. Pour eux et à travers eux pour l’humanité et donc
pour nous, est révélé le lien unique entre le Père et le Fils.
Dans ce Jésus qu’ils pensaient connaître surgit une figure
nouvelle, celle du Fils.
Et voici les trois apôtres définitivement impliqués dans
l’aventure de Jésus. « Ecoutez le » Ils vont
avoir à écouter et à suivre dans une confiance aveugle ce fils
bien-aimé qui va entamer sa marche vers la mort.
Le carême est un des temps d’écoute que l’Eglise nous offre.
Ecouter c’est bien plus qu’entendre. Ceux qui pratiquent une
écoute vraie, sincère, par fonction ou par nature, savent ce
qu’elle demande en disponibilité, en dépouillement de soi, en
empathie profonde.
Je témoigne qu’écouter transforme celui qui écoute. Ici il
s’agit d’écouter le Fils, je le rappelle.
« Jésus s’approcha les toucha et leur dit relevez-vous et
n’ayez pas peur »
Par ce geste et ces paroles il les réintroduit dans la vie
ordinaire. Où il leur faudra écouter.
Dans quelques temps quand Pilate présentera Jésus en disant « Voici
l’homme » il se souviendront en voyant Jésus défiguré
sur la croix de Jésus transfiguré sur la montagne.
Dans sa transfiguration Jésus ne révèle-t -il pas la vérité sur
l’homme ?
La face et le corps lumineux de Jésus projettent sur nous l’éclat
de notre vocation de fils de Dieu, au-delà de tout ce qui brouille
ou défigure l’image de Dieu en nous. Nous sommes si souvent des
miroirs déformants où il devient impossible de reconnaître Dieu.
Nous ne pouvons pas nous installer et en rester là. Comme Abraham
dans la première lecture nous sommes appelés à quitter notre zone
de confort. Et dans la lettre a Thimothée Paul le dit à sa
façon : « Fils bien aimé, avec la force de Dieu,
prends ta part des souffrances liées à l’annonce de
l’Evangile ? »
Rappelons-nous, nous sommes la lumière du monde, car en nous est la
lumière divine.
C’est notre mission de faire entrevoir et grandir la lumière en
tout humain, même dans les ténèbres qui parfois nous envahissent.
Dans toutes les situations et tous les lieux où il s’agit d’aimer,
de servir de rencontrer les autres pour le partage, la solidarité,
la fraternité. Dans tous les combats que nous avons à mener. Nous
ne pouvons en rester là.
Si le carême est chemin vers croix il est aussi chemin vers la
lumière de Pâques.
Redescendons de la montagne, faisons silence, pour entendre la Parole
qui nous éclaire et transforme.
Et Rendons grâce à Dieu pour cette Eucharistie qui nous unit à la
divinité de celui qui a pris notre humanité et qui illumine notre
être et nos chemins humains.
Robert Zimmermann, diacre
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